Gabriella Papadakis et Guillaume Cizeron aspirent à reconquérir le titre mondial. / LUCY NICHOLSON / REUTERS

Eux le savent, l’argent ne fait pas le bonheur. Surtout lorsqu’il a l’âpre saveur de l’inachevé. Un mois après leur déception de Pyeongchang, où ils avaient échoué dans leur conquête du titre olympique en danse sur glace – mais décroché leur première médaille d’argent –, Gabriella Papadakis et Guillaume Cizeron rechaussent les patins. A Milan, le couple français aborde, vendredi 23 mars (à 11 heures), les championnats du monde de la discipline en favoris, et semble décidé à retrouver leur couronne mondiale perdue l’an passé.

L’hiver dernier, à Helsinki, le couple de revenants Tessa Virtue et Scott Moir avaient ôté aux jeunes Bleus leurs rêves d’un troisième titre mondial d’affilée. De retour sur le devant de la scène après une préretraite, les Canadiens, devenus entre-temps les camarades d’entraînement du duo français à Montréal, ont remis ça en Corée, remportant leur deuxième médaille d’or olympique au terme d’un concours de haut vol, mais marqué par un accroc technique lors du programme court des Français. Pour « une sombre histoire de fermeture Eclair », selon les mots de Didier Gailhaguet, le président de la Fédération française des sports de glace (FFSG), un point du tour de cou de la patineuse qui retenait son costume a sauté, dévoilant par moments un téton. Et dérangeant un peu la parfaite ordonnance de leur danse.

Cette fois, le proverbe « jamais deux sans trois » ne s’appliquera pas. Non que les Français aient l’immodestie de penser battre aisément leurs concurrents canadiens ; mais le duo Virtue-Moir n’est pas présent à Milan. Après avoir célébré leur titre de Pyeongchang comme il se doit, les désormais doubles champions olympiques devraient annoncer leur mise en retrait – définitive cette fois – des patinoires. « Ils vont nous manquer », souriait d’un air entendu Gabriella Papadakis après la fin du concours olympique.

Pour cette « célébration post-olympique » proche – géographiquement – de la France et de son public, les Montréalais d’adoption aspirent à décrocher un troisième titre mondial. « Ça va nous faire du bien de refaire les programmes avec la même préparation, mais avec moins de pression, a relevé Papadakis, y voyant une belle manière de finir la saison. »

Réasseoir leur domination sur la glace mondiale

Elle qui avait vécu son « pire cauchemar » sur la glace de Pyeongchang espère avoir « une autre chance de performer, de la façon dont on voulait le faire. » Après les Jeux olympiques, la jeune femme (elle a 22 ans) confiait à L’Equipe s’être sentie « comme [dans] un cauchemar où t’es à l’école, tu vois que tout le monde te regarde et tu te rends compte que t’es tout nu. Mais celle qui expliquait au Monde avant les Jeux être « quasiment née sur des patins » – sa mère est entraîneuse de patinage – s’agaçait, outre que « [sa] robe se soit ouverte et qu’[elle] ait fini à moitié à poil », que cet épisode les « ait empêchés de bien patiner ».

A Milan, le couple français ne partagera plus leur entraîneur, Romain Haguenauer, avec leurs principaux rivaux. Une nouvelle donne dont les danseurs clermontois espèrent profiter pour réasseoir leur domination sur la danse mondiale. Un mérite souligné par leur coach, qu’ils ont suivi à Montréal lorsqu’il a choisi de quitter la France, qui estimait aux JO que les juges avaient reconnu « leur infime supériorité » en leur accordant d’excellente notes (en dépit de leur mésaventure costumière), « mais le sort en [avait] décidé autrement. »

Couple au « très gros potentiel » mais dont l’« ascension assez fulgurante » a surpris jusqu’à leur entraîneur et « conseiller matrimonial » – c’est une image, comme Virtue et Moir, que l’Internet canadien rêve de voir en couple, les Français comparent leur relation à celle d’un frère et d’une sœur – les doubles champions du monde (2015 et 2016) et quadruples champions d’Europe (2015, 2016, 2017 et 2018) entament leur reconquête vendredi à Milan. Et tenteront, lorsque retentiront les premières notes de Shape of you d’Ed Sheeran lors de leur programme court, de ne pas penser à ce tour de cou qui les a laissés à un fil de l’or olympique.