Série sur OCS Go à la demande

Sébastien Chassagne a de faux airs de Woody Allen, et l’impressionnante palette de jeu d’un Jean Dujardin. Il possède aussi le sens du rythme qu’il faut à la comédie, un charme discret virant à l’émouvant lorsque le drame pointe son nez. Certes – et il faut le souligner tant cela fait défaut en France –, tous les interprètes d’Irresponsable se montrent excellents (notamment le jeune Théo Fernandez), mais celui qui porte cette série s’y révèle un comédien exceptionnellement doué.

Julien (Sébastien Chassagne, donc), la petite trentaine encore proche de la préadolescence risque-tout, revient vivre chez maman, à Chaville, dans la banlieue parisienne. Provisoirement, bien sûr. Le temps de chercher un petit boulot qui lui laisse tout de même le loisir de fumer ses pétards. Par hasard, il retombe sur Marie, qui avait quitté précipitamment le lycée sans plus jamais donner de nouvelles, alors que les deux ados venaient de faire l’amour ensemble. L’ayant invitée dans un restaurant chinois sans avoir assez d’argent pour manger à deux, il apprend qu’elle a un fils, Jacques, 15 ans, dont il est le père.

Rythme et humour

Comment devient-on un père, quand on a déjà la charge d’être un fils ? Ça veut dire quoi, en fait, « être père » ? Quelles preuves en donner, face à un ado moins « branleur » que soi-même ? Et comment « récupérer » la maman de son fils, que l’on aime toujours ? Sans parier sur une suite de sketchs mais sur un scénario de dix épisodes, le créateur d’Irresponsable, Frédéric Rosset, avait écrit avec sa sœur Camille, en 2016, une première saison tout en grâce et en burlesque, tendre à l’égard de ses personnages et sans fausse note dans son versant comique.

La deuxième saison, qu’OCS vient de mettre en ligne, maintient le rythme et l’humour, y ajoutant même de nouveaux et beaux personnages, ainsi que deux ou trois scènes très émouvantes, alors que les enjeux, pour Julien, sont demeurés les mêmes. Englué dans le « glandisme » et toujours en recherche de paternité, il n’a pas vraiment changé, en dépit d’efforts méritoires.

Sébastien Chassagne incarne Julien. / TETRA MEDIA FICTION/LA PÉPINIÈRE

Irresponsable, dont la troisième saison, en cours d’écriture, devrait être la dernière, se montre une exception française à plus d’un ­titre. Ce fut d’abord le projet de fin d’études de Frédéric Rosset, qui intégra en 2013 la première promotion de la section « Séries » au sein de la principale école de cinéma française, la Fémis. Un projet d’école repris à son compte par le bouquet d’Orange, OCS, qui se risque régulièrement à donner carte blanche à de jeunes artistes. Même si les moyens alloués pour les tournages sont notoirement chiches. Par ailleurs, Irresponsable fait partie des très rares séries comiques françaises tournées dans le format du 26 minutes, ­celui des sitcoms américaines, qui leur convient pour tenir le rythme et ne pas s’essouffler. Sur ce format, Irresponsable est indéniablement la meilleure de celles que nous avons pu voir.

Mais cette série se révèle avant tout une exception en ce que, contrairement à nombre de comédies françaises grand public au cinéma, affligeantes voire rances, elle s’appuie sur un vrai talent d’écriture, alerte et fin, pour réinventer un genre ancien, celui de la comédie du remariage.

Irresponsable, saison 2, série créée par Frédéric Rosset. Avec Sébastien Chassagne, Théo Fernandez, Marie Kauffmann, Nathalie Cerda (Fr., 2018, 10 × 26 min). Saisons 1 et 2 sur OCS Go. Saison 1 aussi sur TV5Monde jusqu’au 30 mai.