Documentaire sur Arte à 23 h 45

Alors qu’il n’avait que 14 mois, Yanie a été placé dans une famille d’accueil. Désormais âgé de 14 ans, l’adolescent s’apprête à vivre le déchirement de la séparation. Malgré toute la tendresse qu’ils lui témoignent, Myriam (65 ans) et Jacques (70 ans), qui l’ont élevé, s’apprêtent à prendre leur retraite et à passer la main à un autre couple, plus jeune. Ce départ vers l’inconnu, sous un autre toit où il lui faudra trouver sa place, au sein d’une nouvelle école où il lui faudra récréer des liens, est vécu par Yanie comme « un choc ». « Pire même, écrit-il dans son journal, c’est comme mourir pour la première fois, mais pas en vrai. »

Reste qu’au milieu des bouleversements, l’adolescent à la bouille pouponne veut croire au rapprochement avec sa mère, qu’il revoit deux week-ends par mois, depuis sa sortie de prison. Une mère qui aimerait, elle aussi, tenir un rôle, à la faveur de ces changements.

Entouré, ballotté, sans toujours parvenir à placer des mots sur ses peurs, ses doutes, ses douleurs, sa difficulté à savoir où est sa place, ainsi apparaît cet enfant (dé)placé que Ketty Rios Palma a suivi lors de ce moment charnière entre enfance et adolescence.

Yanie, 14 ans va être placé dans une nouvelle famille d'accueil. / Arte

Un entre-deux de vies, de lieux et d’êtres à l’intérieur duquel la caméra de la réalisatrice s’est discrètement glissée. Au point de se faire presque oublier des différents protagonistes qui gravitent autour du garçon, et s’efforcent de faire au mieux, sans toujours y parvenir. Que ce soit les familles d’accueil, les éducateurs, les assistantes sociales. Mais aussi sa mère, qui attendrit autant qu’elle terrifie, par sa maladresse brutale, par la violence de ses mots, crus, blessants, voire humiliants, par la dureté de ses décisions : ainsi, dans son désir farouche de renouer avec son fils, elle ira jusqu’à lui interdire tout contact avec ­Myriam et Jacques, ce qui le conduira « à péter les plombs » et à être brièvement hospitalisé.

Construit en trois actes, ce documentaire poignant dessine, sans apprêt ni commentaire ou « voix off », mais avec une infinie délicatesse, l’itinéraire d’un gamin qui cherche sa définition. Et qui finira, par lancer, comme une victoire, dans son journal : « Je suis le gamin de personne. Un gamin ­orphelin mais un gamin, fils de ­soi-même et fier de l’être. »

Itinéraire d’un enfant placé, de Ketty Rios Palma (Fr., 2017, 55 min).