Charles Aznavour, le 13 décembre 2017, à Paris. / ERIC FEFERBERG / AFP

Des impôts évités, mais en toute légalité. Avec Charles Aznavour, Le Soir et Mediapart ont ajouté, jeudi 29 mars, un nouvel exemple à la longue liste des contribuables français qui recourent, en toute discrétion, à l’optimisation fiscale en exploitant les failles des législations au sein même de l’Europe.

Le quotidien belge et le site d’information français détaillent un montage fiscal élaboré entre 2007 et 2016, qui a permis au chanteur français, aujourd’hui âgé de 94 ans, de défiscaliser une grande partie de ses revenus. M. Aznavour n’a pas eu besoin de dissimuler sa fortune dans des sociétés écrans ou des trusts à l’autre bout du monde : il lui a suffi, comme à beaucoup de contribuables européens, d’ouvrir une société au Luxembourg, le petit duché coincé entre la France et l’Allemagne, membre de l’Union européenne.

Il contestait être un exilé fiscal

Une bonne partie des droits d’auteur du chanteur de La Bohême ont été transférés dans cette société boîte à lettres, baptisée Abricot SA, dont le statut permet une défiscalisation complète des dividendes. Charles Aznavour étant résident fiscal suisse, les revenus générés par ses chansons n’ont quasiment pas été imposés en France. Selon les calculs de Mediapart, « plus d’un million et demi d’euros a légalement échappé à la fiscalité française des dividendes ».

Ce montage respecte les contours de la légalité, mais il dément les affirmations du chanteur : interrogé en 2013, sur RTL, celui-ci se défendait d’être un exilé fiscal, et assurait payer en France les impôts sur ses activités françaises.

L’enquête du Soir et de Mediapart souligne qu’une réorganisation à l’automne 2016 a fait entrer plusieurs membres de la famille du chanteur dans le montage autour d’Abricot. Son épouse, deux de ses enfants et sa sœur sont, depuis cette date, « éligible[s] à une part plus importante des bénéfices issus des droits d’auteur » (seule sa sœur, résidente fiscale dans l’Hexagone, reste théoriquement soumise à la fiscalité française).

Selon les deux quotidiens, cette réorganisation devrait faciliter la succession de M. Aznavour, qui pourra se dérouler dans le cadre du droit luxembourgeois.

Contacté par Mediapart et par Le Soir, Charles Aznavour n’a pas répondu aux sollicitations.