Jean-Luc Martinez, 54 ans, ­président-directeur depuis avril 2013 de l’Etablissement public du Musée du Louvre, a été reconduit en conseil des ministres, mercredi 4 avril, pour un second mandat de cinq ans. Même s’il est contesté par certains, y compris au sein de son établissement, M. Martinez peut se targuer d’un beau bilan.

Lire l’entretien avec Jean-Luc Martinez (en 2014) : « Favoriser les rencontres entre les œuvres d'art et le public »

En tout cas l’a-t-il fait savoir lors de la cérémonie des vœux au personnel du musée, le 30 janvier : l’inauguration du Louvre Abou Dhabi, le développement du Louvre Lens, des expositions comme celles consacrées à Vermeer (325 000 visiteurs, et, dit-il avec un joli sens de la litote, « quelques difficultés à être à la hauteur des attentes d’un public si nombreux »), à Valentin de Boulogne ou à François Ier. Si elles étaient, dans deux cas au moins, sacrément mal organisées, ces expositions ont connu un réel succès. D’où une hausse revendiquée de 14 % de la fréquentation, soit 8,1 millions d’entrées : le Louvre est l’un des musées dont les salles sont les plus visitées au monde.

Lire l’éclairage (en 2014) : Le Musée du Louvre fait sa mue

La feuille de route publiée par le ministère de la culture précise qu’il est demandé au président d’inscrire « plus que jamais le ­Louvre dans une perspective de rayonnement international par la poursuite de l’action auprès de l’Agence France Muséums dans le cadre de l’accord intergouvernemental avec les Emirats arabes unis ; la formation des personnels du Louvre et leur équipement numérique pour répondre au défi linguistique de la diversité de nationalités des visiteurs ; l’affirmation de la place du Louvre comme premier musée du monde, en développant les projets d’expositions internationales et de partenariats scientifiques à travers le monde, en particulier en Asie, et l’amplification des échanges scientifiques ».

Jean-Luc Martinez, lui, estime avoir attiré un public « plus international, plus jeune et connecté, mais aussi moins familier des musées », et entrepris des travaux « structurants » : 22 800 m2 de salles rénovées, tant dans les espaces d’accueil sous la pyramide qu’au sein des collections (objets d’art, peintures françaises des XVIIIe et XIXe siècles, peintures françaises du XVIIe siècle, peintures des écoles du Nord, sculptures françaises des XVIIIe et XIXe siècles, etc.).

« 816 nouvelles œuvres sont entrées dans les collections du Louvre depuis 2013, dont 12 trésors nationaux »

La feuille de route l’encourage à persévérer dans ce sens : « Innover pour aller au-devant des citoyens par des actions renforcées pour les publics scolaires, moins nombreux depuis les attentats en Ile-de-France ; pour faire du musée un lieu où se tissent des liens intergénérationnels ; pour que les visiteurs soient davantage acteurs de leur parcours et, enfin, en poursuivant l’amélioration de l’accueil et de la qualité de visite au Louvre et le travail entrepris sur la médiation ».

Ceux qui critiquent l’action de M. Martinez déplorent la fermeture de trop nombreuses salles. A quoi le Louvre répond qu’« un établissement de 360 000 m² de plancher ne peut être raisonnablement entretenu sur le seul mardi [jour de fermeture au public]. » A donc été élaboré un « Plan d’ouvertures ­garanties », qui doit permettre d’« étaler l’entretien du musée sur toute la semaine, faciliter un équilibre entre rénovation des espaces muséographiques et entretien courant, tout en maintenant un taux optimal d’ouverture des salles (90 % et 100 % des salles ouvertes le week-end, hors espaces en rénovation) quand le public est le plus nombreux ». La politique d’acquisition est elle aussi active : « 816 nouvelles œuvres sont entrées dans les collections du Louvre depuis 2013, dont 12 trésors nationaux. »

« Envergure internationale »

Mis en cause aussi : le déménagement des réserves non loin du Louvre Lens (lequel a accueilli 2,8 millions de visiteurs en cinq ans, ce qui en fait le troisième musée de France, hors Paris), à Liévin (16 millions d’euros prévus pour les chantiers des collections, 60 millions d’euros pour la construction du bâtiment). Les conservateurs du musée et les chercheurs étrangers s’inquiètent des déplacements nécessaires à leurs recherches.

Enfin, la ministre de la culture, Françoise Nyssen, souhaite que le Louvre se situe « au cœur d’un réseau muséal plus large, à la fois en redéfinissant une coopération pleine et entière avec la Réunion des musées nationaux – Grand Palais, dans la perspective de la réouverture du Grand Palais, avec la programmation d’expositions temporaires transversales et innovantes, à envergure internationale, et par une action renforcée de coopération avec les musées territoriaux ou d’autres institutions afin de rendre les collections accessibles à tous les publics au Louvre comme sur l’ensemble du territoire ».

Toutefois, pas à n’importe quel prix : alors que Mme Nyssen semble vouloir promener La Joconde de ci, de là, le directeur du Louvre lui a rappelé qu’elle était très fragile, voire intransportable. Il a même été jusqu’à faire chiffrer le coût d’un éventuel déplacement, révélé par Le Parisien : 30 millions d’euros. Une somme dissuasive.