Martin Luther King, le 28 août 1963, lors de la Marche pour les droits civiques à Washington. / AFP

Documentaire jeudi 5 avril, sur France 3 à 23 heures

A l’occasion du cinquantième anniversaire de la mort de Martin Luther King, le 4 avril 1968, plusieurs documentaires reviennent sur le mouvement des droits civiques aux Etats-Unis.

L’un d’eux, La Longue Marche de Martin Luther King, du Britannique John Akomfrah, retrace l’épopée de l’une des plus grandes manifestations politiques de l’histoire du pays. Parmi les intervenants qui racontent les coulisses de cette marche réunissant 200 000 personnes à Washington, le 28 août 1963, on retrouve des organisateurs (John Lewis, Norman Hill), des marcheurs connus (Harry Belafonte, Sidney Poitier), ainsi que des célébrités qui ont été marquées par l’événement (Oprah Winfrey).

Le documentaire revient sur les prémices de la marche, notamment la campagne de Birmingham (Alabama), en janvier 1963. Alors que le mouvement des droits civiques est dans l’impasse, Martin Luther King organise une manifestation pacifique dans cette ville du Sud, la plus ségréguée des Etats-Unis. Le chef de la police locale, Eugene Connor, dit « le Taureau », utilise des canons à eau et des chiens d’attaque sur les manifestants, enfants comme adultes. Les images télévisées de cette répression choquent l’Amérique.

Rigueur et émotion

Malgré des mois de préparation, la marche ne se déroulera pas tout à fait comme prévu. Le réalisateur restitue les différents rapports de force à l’œuvre. Les trois grands stratèges de la manifestation – Martin Luther King, A. Philip Randolph et Bayard Rustin –, sont loin d’être d’accord sur le sens politique à donner à cet événement et sur la façon de l’organiser.

Et ils doivent également faire face aux réticences de l’administration Kennedy et à la féroce opposition du FBI et de son patron, J. Edgar Hoover. Tous craignent que la marche bascule dans le chaos. ­ Pacifique, elle se conclut par l’inoubliable « I have a dream » de Martin Luther King. Un documentaire rigoureux qui ne manque pas d’émotion.

Programmé le samedi 7, sur Toute L’Histoire, Jackie Kennedy, militante de la première heure, que signe Maud Guillaumin, s’attache, lui, au combat antiségrégationniste méconnu de celle qui devint First Lady à l’âge de 31 ans. La réalisatrice, qui lui avait déjà consacré un essai politique (Jackie Kennedy, une femme d’influence, Les Editions du Moment, 2014), montre comment, à travers une série de gestes symboliques, elle a contribué à faire reculer les inégalités raciales aux Etats-Unis.

Jackie Kennedy s’engage

Le plus emblématique est celui qu’elle impose le jour des funérailles de son mari, le 25 novembre 1963 : « Jackie » exige que des soldats blancs et noirs portent le cercueil de « J. F. K », une première dans l’histoire des Etats-Unis.

Femme de caractère, elle n’a toutefois pas attendu d’entrer à la Maison Blanche pour s’engager en faveur des Noirs. Elle qui ne supporte pas les propos racistes et antisémites de son beau-père, noue très tôt des liens avec des personnalités noires : c’est ainsi qu’elle demande à la styliste Ann Lowe de dessiner sa robe de mariage en 1953.

Jackie Kennedy joue un rôle important dans la campagne présidentielle de son mari qui cherche à séduire les électeurs noirs. Elu en novembre 1960, grâce à leurs votes, John Fitzgerald Kennedy ne fait, dans un premier temps, rien pour améliorer leur condition. Jackie, elle, crée une petite école mixte à la Maison Blanche, invite Grace Bumbry à venir y chanter, offre des cadeaux de Noël à 700 enfants noirs…

Portrait un peu lisse

La première dame joue surtout un rôle discret d’intermédiaire entre son mari et les militants du mouvement des droits civiques. En coulisses, elle œuvre à l’intégration du chargé des relations de la Maison Blanche, Andrew Hatcher, l’un des premiers Noirs à conseiller un président américain.

Interrogés par la réalisatrice, des militants noirs qui ont connu Jackie, des anciens conseillers de la Maison Blanche, des historiens, des journalistes, et la cantatrice Jessye Norman, racontent avec beaucoup d’admiration ce combat. Certains n’hésitant pas à grandir le rôle de Jackie, au point de la décrire comme un « fer de lance » du mouvement des droits civiques.

A cet égard, la réalisatrice ne résiste pas à la tentation de faire de son sujet une icône. Le portrait de la première dame reste très lisse. Le documentaire omet ainsi de préciser qu’elle ignore les combats des féministes américaines de son temps, qui s’inscrivent pourtant dans la dynamique des grandes manifestations en faveur des droits civiques.

En outre, le film présente Jackie Kennedy comme une femme qui choisit ses causes, tout en acceptant parfaitement son rôle de première dame. Pour elle, « le rôle d’une femme, c’est d’aider son mari ». Une parole qui aurait mérité d’être replacée dans son contexte, celui d’une société américaine où les rôles sexuels traditionnels sont encore complètement intériorisés et que les Kennedy tentent tant bien que mal d’incarner.

« La Longue Marche de Martin Luther King », de John Akomfrah (Royaume-Uni, 2013, 60 min), le jeudi 5 avril à 23 heures sur France 3.

« Jackie Kennedy, militante de la première heure », de Maud Guillaumin (France, 2017, 52 min), diffusé sur Toute L’Histoire, le samedi 7 avril à 20 h 45.