Le 15 juin 2016, un policier se tient face à la photo des deux agents assassinés à leur domicile à Magnanville. / PASCAL POCHARD-CASABIANCA / AFP

Les quatre dernières gardes à vue dans l’enquête sur l’assassinat djihadiste d’un commissaire adjoint et de sa compagne en 2016 à Magnanville (Yvelines) ont été levées jeudi 12 avril après-midi, a indiqué une source judiciaire.

La juge d’instruction a mis un terme à ces gardes à vue « en l’absence d’éléments suffisamment incriminants à ce stade », selon cette source. Une policière, ses deux enfants et une femme de leur entourage, déjà écrouée dans un autre dossier antiterroriste, étaient interrogés par les enquêteurs depuis lundi matin. Les gardes à vue de deux autres personnes, également interpellées lundi, avaient déjà été levées mardi et mercredi soir.

Une clé USB qui intrigue

La juge d’instruction avait ordonné ce coup de filet pour tenter d’établir comment le tueur avait choisi ses victimes et trouvé leur adresse. Le 13 juin 2016, Larossi Abballa, 25 ans, avait assassiné le couple à coups de couteau, sous les yeux de leur fils de 3 ans. Il avait été tué par les forces de l’ordre après avoir revendiqué son acte au nom de l’organisation Etat islamique (EI).

Parmi les personnes interpellées par la sous-direction antiterroriste (Sdat) de la police judiciaire se trouvaient une policière de 48 ans, ex-responsable départementale du syndicat Alliance, et ses deux enfants, de 26 et 30 ans, présentant selon les enquêteurs des « signes de radicalisation ».

Mina B., une jeune femme hébergée au printemps 2016 dans la famille de la policière, était également entendue. Cette dernière, âgée de 25 ans et fichée S (pour « sûreté de l’Etat »), est déjà mise en examen et placée en détention provisoire depuis octobre dans une enquête distincte, soupçonnée d’avoir aidé une candidate au djihad en zone irako-syrienne.

Lors d’une perquisition à son domicile en avril 2017, les policiers ont retrouvé une clé USB d’où avait été effacée une liste remontant à 2008 de 2 626 agents des renseignements français. A ce stade, les enquêteurs ne savent pas si elle a consulté ce fichier, sur lequel ne figurent pas les noms des deux victimes de Magnanville, Jean-Baptiste Salvaing et Jessica Schneider. Egalement interpellé lundi, le frère de Mina B. a été remis en liberté mercredi soir. Mardi, un homme de 33 ans avait déjà été relâché.

Trois mises en examen

Trois suspects sont par ailleurs mis en examen dans cette enquête, dont deux pour association de malfaiteurs terroriste criminelle, Charaf-Din Aberouz et Saad Rajraji. Condamnés en 2013 aux côtés d’Abballa dans une filière afghano-pakistanaise de recrutement au jihad, ils sont soupçonnés d’avoir pu apporter un soutien logistique au tueur. Mais les enquêteurs ne retiennent pas leur complicité directe dans l’attaque, et les suspects ont finalement été relâchés sous contrôle judiciaire.

En revanche, les enquêteurs pensent avoir identifié un possible « deuxième homme » : Mohamed Aberouz, 24 ans. Ce frère cadet de Charaf Din Aberouz a été mis en examen pour « complicité d’assassinats terroristes » et incarcéré.

Les attaques terroristes en France depuis trois ans

Depuis 2015, les services de lutte antiterroriste ont recensé des dizaines de projets d’attaque sur le sol français. Voici une liste de ceux qui ont abouti :

  • 7 janvier 2015 : 12 morts

Les frères Saïd et Chérif Kouachi assassinent douze personnes dans les locaux de Charlie Hebdo, à Paris : huit membres de la rédaction, un invité, deux policiers et un agent d’entretien de l’immeuble. Après deux jours de traque, ils sont tués par les forces de l’ordre à Dammartin-en-Goële (Seine-et-Marne).

  • 8-9 janvier 2015 : 4 morts

Amedy Coulibaly, un proche des frères Kouachi, tue une policière municipale à Montrouge (Hauts-de-Seine) le 8 janvier. Le lendemain, il tue quatre personnes dans l’Hyper Cacher de la porte de Vincennes, à Paris, avant d’être abattu par les forces de police.

  • 19 avril 2015 : 1 mort

Sid Ahmed Ghlam, un Algérien de 30 ans, est arrêté à Paris en possession d’une arme de poing et de plusieurs fusils d’assaut. Il a tué quelques heures plus tôt une jeune femme à Villejuif (Val-de-Marne). L’enquête a établi que son projet initial était de commettre une attaque contre une église de Villejuif.

  • 26 juin 2015 : 1 mort

Yassin Salhi, 35 ans, décapite son patron avant de précipiter sa voiture contre un stock de bonbonnes de gaz dans une usine de Saint-Quentin-Fallavier (Isère).

  • 13 novembre 2015 : 130 morts, plus de 400 blessés

Neuf djihadistes rentrés de Syrie en suivant la route des migrants mènent trois attaques simultanées devant le Stade de France, à Saint-Denis (Seine-Saint-Denis), dans la salle du Bataclan et devant des terrasses de cafés à Paris. Les assaillants sont belges, français et irakiens. Le dixième membre du commando, Salah Abdeslam, sera arrêté quelques mois plus tard à Bruxelles.

  • 13 juin 2016 : 2 morts

Larossi Abballa assassine un couple de policiers à leur domicile de Magnanville (Yvelines). Il est abattu par le RAID.

  • 14 juillet 2016 : 86 morts et plus de 450 blessés

Un chauffeur de poids lourd tunisien, Mohamed Lahouaiej Bouhlel, précipite son camion sur la foule massée sur la promenade des Anglais, à Nice (Alpes-Maritimes), pour assister au feu d’artifice du 14-Juillet. Il est abattu par des policiers tandis qu’il tire des coups de feu depuis la cabine.

  • 26 juillet 2016 : 1 mort

Adel Kermiche et Abdel Malik Petitjean prennent en otage cinq personnes dans l’église de Saint-Etienne-du-Rouvray (Seine-Maritime) avant d’égorger le père Hamel.

  • 20 avril 2017 : 1 mort

Karim Cheurfi, 39 ans, tire au fusil d’assaut sur une fourgonnette de police stationnée sur les Champs-Elysées, à Paris. Il tue un policier et fait deux blessés avant d’être abattu.

  • 1er octobre 2017 : 2 morts

Ahmed Hanachi, un Tunisien de 29 ans en situation irrégulière, tue deux jeunes femmes à l’aide d’un couteau sur le parvis de la gare Saint-Charles de Marseille (Bouches-du-Rhône).

  • 23 mars 2018 : 3 morts

Après avoir attaqué les passagers d’une voiture puis des CRS à Carcassonne, Redouane Lakdim, un homme de 26 ans connu pour des faits de petite délinquance, s’est retranché dans le supermarché Super U de Trèbes, dans l’Aude, prenant des individus en otages. Il a été abattu quelques heures après. Un bilan du ministère de l’intérieur fait état de trois morts et au moins trois blessés dans ces attaques.