Le Sénat polonais, dominé par les conservateurs, a adopté lundi 16 avril des amendements modifiant légèrement les réformes controversées de la justice qui avaient provoqué une réaction ferme de la Commission européenne. Les modifications, déjà adoptées la semaine dernière par la chambre basse du Parlement, concernent la loi sur le Conseil national de la magistrature (KRS), celle sur les tribunaux de droit commun et celle sur la Cour suprême.

Préoccupée par l’évolution de l’Etat de droit en Pologne et par la crainte de voir le pouvoir politique influencer le pouvoir judiciaire, Bruxelles avait déclenché à la fin de décembre la phase préliminaire d’une procédure inédite — l’article 7 du traité de l’Union européenne — qui peut mener, en théorie, à une suspension des droits de vote du pays au sein de l’Union.

Alors que les conservateurs estiment que ces modifications répondent aux demandes de Bruxelles, l’opposition et la Cour Suprême les jugent « cosmétiques » voire « fictives ».

L’un des amendements votés est censé limiter le pouvoir du ministre de la justice de démettre un président ou un vice-président de tribunal. Désormais, le ministre ne pourra le faire qu’après avoir demandé un avis du collège du tribunal (organe élu par les juges eux-mêmes) et du KRS. Insuffisant pour l’opposition, qui souligne que le nouveau Conseil national de la magistrature comprend des juges proches du ministre de la justice.

Répondant également aux préoccupations de Bruxelles, un autre amendement autorise désormais le même âge de départ à la retraite — à 65 ans — pour les deux sexes, contre 65 pour les hommes et 60 pour les femmes précédemment ; tout en laissant les juges femmes partir à 60 ans si elles le souhaitent.

« Changements cosmétiques »

La Cour suprême avait critiqué la semaine dernière les modifications apportées par les conservateurs. « Il faut malheureusement constater que les changements proposés ont un caractère fictif, cosmétique », avait regretté la Cour dans un communiqué publié avant le vote à la chambre basse. Selon la Cour, la plupart des dispositions « les plus controversées du point de vue de l’Etat de droit, pointées par les organes internationaux, restent inchangées ».

En visite à Varsovie la semaine dernière, le vice-président de la Commission européenne, Frans Timmermans, avait appelé les conservateurs polonais à faire encore un effort pour parvenir à un compromis avec Bruxelles, tout en se félicitant du dialogue engagé depuis le remaniement du gouvernement, en décembre.

Pour entrer en vigueur, les amendements doivent désormais être signés par le président Andrzej Duda.