Jack Johnson (1878-1946) a été le premier Noir champion du monde de boxe en catégorie poids lourds. / AP

Après une série d’attaques contre le New York Times, puis James Comey, et après les funérailles de Barbara Bush, c’est un tweet de Donald Trump qui n’est pas passé inaperçu, samedi 21 avril, il a écrit :

« Sylvester Stallone m’a appelé pour me parler de l’histoire du champion de boxe poids lourds Jack Johnson. Les épreuves et les tribulations qu’il a traversées sont incroyables, sa vie complexe et controversée. Au fil des années, d’autres se sont penchés sur cette question, la plupart pensaient que cela se ferait, mais oui, j’envisage un Pardon complet ! »

Premier Noir champion du monde en catégorie poids lourds

Jack Johnson (1878-1946) a été le premier Noir champion du monde de boxe en catégorie poids lourds. Le 4 juillet 1910 devant 25 000 spectateurs réunis à Reno, dans le Nevada, il écrase l’ancien champion James Jeffries. Un traumatisme pour l’Amérique blanche et ségrégationniste d’alors.

Pendant le combat, le public, majoritairement blanc, crie : « Tuez le nègre ! » Au bout de quinze reprises, pourtant, Jeffries, que les propagandistes de la suprématie blanche avaient fait sortir de sa retraite, doit s’avouer vaincu. A l’issue du combat, retransmis en direct par les téléscripteurs, dans plusieurs grandes villes telles que New York et Chicago, des groupes racistes s’attaquent à des Noirs, pris au hasard. Il y eut des dizaines de morts.

Jack Johnson vs James J. Jeffries (1910)
Durée : 03:38

Jack Johnson était né en 1878 à Galveston, au Texas. Anciens esclaves, ses parents étaient libres mais extrêmement pauvres. Pour échapper à sa condition, Jack Johnson se lance dans la boxe. A cette époque, les Noirs pouvaient affronter des adversaires blancs dans toutes les catégories, sauf celle des poids lourds. Johnson brise ce tabou en 1908 et devient champion du monde.

Contexte de la ségrégation raciale

Mais cette victoire est contestée par les tenants de la suprématie blanche, qui poussent l’ancien champion James Jeffries, qui avait pris sa retraite et quarante kilos, à remonter sur le ring, lors du combat de Reno, en 1910. Les actualités filmées montrant la victoire incontestable de Johnson sont interdites dans certains Etats américains. L’idée que le nouveau champion du monde soit noir était insupportable à beaucoup.

Johnson aggrave son cas en épousant, en décembre 1912, Lucille Cameron, une femme blanche, ce qui était alors interdit par le Mann Act de 1910, loi qui criminalise le fait de transporter des femmes ou des jeunes filles d’un Etat à un autre « dans un quelconque but immoral » (any other immoral purpose) et permet aux autorités de poursuivre des célébrités jugées « dangereuses ».

Condamné à un an de prison, il quitte les Etats-Unis et arrive à Paris. Le 27 juin 1914, il se bat, au Vél’ d’Hiv’, contre Frank Moran un adversaire blanc venu de Pittsburgh, qu’il écrase. Mais la première guerre mondiale éclate quelques jours plus tard, et Johnson doit quitter l’Europe. Il perd son titre en 1915 à La Havane face à Jess Willard et préfère rentrer aux Etats-Unis purger sa peine, en 1920. Il meurt à 68 ans, le 10 juin 1946 dans un accident de la route.

Jack Johnson: Unforgivable Blackness | PBS America
Durée : 02:39

Dans la culture populaire, la pièce de théâtre d’Howard Sackler, The Great White Hope (L’insurgé, en 1967), raconte sa carrière. Jack Johnson a inspiré Miles Davis qui enregistre l’album A Tribute to Jack Johnson en 1971. En 2004, le documentariste de Ken Burns réalise Jack Johnson. Le champion qui divisa l’Amérique (Unforgivable Blackness : The Rise and Fall avril Jack Johnson).

Contexte de l’enquête russe

Cette annonce intervient après que Donald Trump a accordé, vendredi 13 avril, une grâce présidentielle à Lewis « Scooter » Libby, ancien conseiller de la présidence George W. Bush condamné dans l’affaire Valerie Plame, une espionne de la CIA démasquée en pleine controverse sur l’intervention en Irak. Cette décision est dénoncée comme un message à ses proches impliqués dans l’enquête russe.

En vertu de l’article II, section II de la Constitution des Etats-Unis, « le président (…) aura le pouvoir d’accorder des sursis et des grâces pour crimes contre les Etats-Unis, sauf dans les cas d’impeachment ».

Mais le département de la justice n’accorde généralement pas de pardon posthume, parce qu’il préfère consacrer du temps aux cas de personnes en vie.