Serge Sarkissian, le 26 décembre 2016. / Dmitri Lovetsky / AP

Après plus de dix jours de contestation, le premier ministre arménien Serge Sarkissian a démissionné, lundi 23 avril. « Je quitte le poste de dirigeant du pays », a déclaré Serge Sarkissian, selon son service de presse cité par l’agence de presse officielle arménienne Armenpress. Le chef de la contestation et député « Nikol Pachinian avait raison. Et moi, je me suis trompé », a-t-il ajouté.

Cette annonce surprise est intervenue quelques heures après la libération de Nikol Pachinian, interpellé la veille lors d’une manifestation de l’opposition. Le chef de file de la contestation a aussitôt rejoint les protestataires dans les rues d’Erevan, en lançant : « Tout le monde a déjà compris que nous avons gagné ! »

Des milliers de manifestants réunis lundi sur la place de la République, en plein centre de la capitale arménienne, où est situé le siège du gouvernement, ont accueilli par des cris de joie et des applaudissements la nouvelle de la démission du premier ministre.

Manœuvre pour rester au pouvoir

Des milliers de personnes protestaient depuis des jours contre le maintien au pouvoir de M. Sarkissian, qui fut président du pays de 2008 à 2018. Elu premier ministre le 17 avril alors qu’il venait d’achever son second et dernier mandat présidentiel, M. Sarkissian revenait pratiquement au pouvoir dans un pays où le président exerce désormais des fonctions largement protocolaires, depuis la réforme constitutionnelle de 2015 qui a transformé l’Arménie en république parlementaire, où le pouvoir exécutif réel est entre les mains du premier ministre.

Lundi matin, des militaires en tenue avaient, pour la première fois, rejoint les rangs des manifestants, témoignant d’une situation de plus en plus critique pour les autorités. Le député contestataire avait été interpellé la veille, après une entrevue infructueuse avec le premier ministre, provoquant une grande manifestation de protestation qui a rassemblé des dizaines de milliers de personnes sur la place de la République, au centre de la capitale.

Plus tôt dans la journée de lundi, le premier vice-premier ministre Karen Karapetian avait annoncé à la télévision publique qu’il rencontrerait dans la journée M. Pachinian « pour discuter avec lui d’une possibilité de dialogue », à la veille de la journée de commémoration du génocide arménien de 1915, mardi, « une journée très importante pour notre peuple ».

Au-delà des manœuvres de Serge Sarkissian pour rester au pouvoir, les manifestants reprochaient à cet ancien militaire de 63 ans de n’avoir pas su faire reculer la pauvreté et la corruption, alors que les oligarques ont toujours la haute main sur l’économie du pays.

Le taux de pauvreté de l’Arménie était de 29,8 % en 2016 contre 27,6 % en 2008 selon les données de la Banque mondiale, tandis que le Revenu national brut (RNB) par habitant stagnait à 3 770 dollars, une somme quasi identique à celle d’il y a dix ans.