Le recteur de la grande mosquée de Paris, Dalil Boubakeur, en 2016. / MATTHIEU ALEXANDRE / AFP

Un « procès injuste et délirant ». Dans un communiqué, diffusé lundi 23 avril, le recteur de la grande mosquée de Paris, Dalil Boubakeur, a rejeté les affirmations d’un manifeste contre « le nouvel antisémitisme », signé par près de trois cents personnalités. Le texte, publié dimanche dans Le Parisien, dénonce « l’antisémitisme musulman » qui provoquerait « une épuration ethnique à bas bruit ».

Signé notamment par Nicolas Sarkozy, Manuel Valls, Laurent Wauquiez, Charles Aznavour ou encore Gérard Depardieu, le texte appelle à ce que « soient frappés d’obsolescence par les autorités théologiques » musulmanes « les versets du Coran appelant au meurtre et au châtiment des juifs, des chrétiens et des incroyants », « afin qu’aucun croyant ne puisse s’appuyer sur un texte sacré pour commettre un crime ».

Mais pour M. Boubakeur, « cette tribune présente le risque patent de dresser les communautés religieuses entre elles ».

« Les citoyens français de confession musulmane majoritairement attachés aux valeurs républicaines n’ont pas attendu [cette] tribune (…) pour dénoncer et combattre depuis des décennies l’antisémitisme et le racisme antimusulman sous toutes ses formes. »

De son côté, le président de l’observatoire national contre l’islamophobie, Abdallah Zekira, a condamné un débat « nauséabond et funeste » sur l’islam et a appelé les signataires à cesser « d’accabler l’islam et les musulmans ».

« Cette tribune est révélatrice d’une inquiétude »

Invité de France Inter lundi matin, l’essayiste Pascal Bruckner, qui a signé cette tribune, s’est défendu de toute stigmatisation des musulmans. « Nous n’appelons pas à la stigmatisation, mais à l’insurrection des bonnes volontés et, dans ces bonnes volontés, les musulmans réformateurs, les musulmans libéraux, les musulmans éclairés sont évidemment d’accord, a-t-il expliqué. Non seulement nous ne stigmatisons pas, mais nous avons un certain nombre d’imams qui ont signé avec nous et qui sont eux-mêmes horrifiés par ce qui se passe. »

M. Bruckner fait notamment référence à l’imam de Nantes Mohamed Guerroumi et à l’ancien imam de Drancy (Seine-Saint-Denis), Hassen Chalghoumi. Dimanche, sur Franceinfo, la ministre de la justice, Nicole Belloubet, a déclaré qu’il fallait « tout faire pour éviter une guerre des communautés ». « Cette tribune est révélatrice d’une inquiétude. (…) Il faut y répondre par une volonté de cohésion », a-t-elle poursuivi.

Cette tribune est publiée un mois après l’assassinat de Mireille Knoll, une octogénaire retrouvée morte à la fin du mois de mars dans son appartement à Paris, après avoir été frappée de coups de couteau. Plusieurs milliers de personnes avaient participé à une marche blanche contre l’antisémitisme en réaction à ce meurtre, pour lequel le parquet de Paris a retenu le caractère antisémite.