Nouveaux créneaux horaires, refonte du système d’enchères, assouplissement des règles de revente des matchs : la LFP a imaginé les meilleures options pour soutirer un maximum d’argent à Orange, Canal+ et BeIn Sports / JEAN-CHRISTOPHE VERHAEGEN / AFP

Sans préavis, le football français s’est brutalement relancé dans la bataille des droits sportifs. La Ligue de football professionnel (LFP) a averti au dernier moment, mercredi 25 avril, qu’elle relançait l’appel d’offres pour la retransmission des matchs du championnat de France de Ligue 1 pour la période 2020-2024. Les candidats remettront une offre qualitative le 28 mai, tandis que la procédure d’enchères aura lieu le 29 mai.

Avant de desserrer à nouveau les cordons de la Bourse pour s’offrir de coûteuses compétitions sportives, SFR, qui est encore confronté à un lourd endettement, préfère reconquérir des abonnés

Nouveaux créneaux horaires, refonte du système d’enchères, assouplissement des règles de revente des matchs : la LFP a imaginé les meilleures options pour soutirer un maximum d’argent à Orange, Canal+ et BeIn Sports, mais aussi aux géants de la Silicon Valley, comme Amazon, qu’elle pense intéresser, ou aux agences médias (IMG, Mediapro…), qui deviennent progressivement des éditeurs de contenus.

Longtemps, la LFP a tergiversé sur le meilleur timing à adopter pour lancer son appel d’offres. Très volontariste au moment où SFR était au mieux de sa forme et dépensait sans compter dans la Ligue des champions, elle s’est mise à hésiter après la chute en Bourse de l’opérateur, en novembre 2017. Pas sûr qu’en se lançant maintenant la LFP ait choisi le meilleur moment.

Selon nos informations, SFR a fait savoir à la Ligue qu’il ne participerait pas à l’appel d’offres s’il était lancé avant la fin de l’année. L’opérateur, qui a remanié son management à l’automne, pense avoir amorcé son redressement, mais souhaite procéder par étapes.

Possibilité de sous-licencier les lots, une fois acquis

Avant de desserrer à nouveau les cordons de la Bourse pour s’offrir de coûteuses compétitions sportives, SFR, qui est encore confronté à un lourd endettement, préfère reconquérir des abonnés et assurer la diffusion de la Ligue des champions à la rentrée. Entre-temps, une autre échéance l’attend : Altice, sa maison mère, a prévu de procéder à un « spin-off », en séparant les activités américaines et européennes, en juin.

Visiblement, Didier Quillot, directeur général de la LFP, semble prêt à se passer de ce candidat potentiel. « L’appel d’offres a été conçu et structuré indépendamment des uns et des autres, et selon toutes les hypothèses », a-t-il déclaré, répondant à une interrogation sur l’éventuelle défection de la marque au carré rouge et blanc.

L’opérateur changera-t-il d’avis à l’approche de la procédure ? Une chose est sûre : l’époque où il dépensait 120 millions d’euros par an dans la Premier League anglaise et 350 millions dans la Ligue des champions au nom de la convergence entre les médias et les télécoms est révolue.

Cette probable défection ne signifie pas pour autant que le spectateur de SFR Sport (en passe d’être rebaptisé RMC Sport) ne pourra plus regarder un match sur son écran. Pour la première fois, la LFP introduit dans sa procédure d’appel d’offres la possibilité de sous-licencier les lots, une fois acquis. L’objectif : offrir plus de souplesse aux diffuseurs et les encourager à prendre des risques financiers plus importants. Dans l’esprit de la LFP, il s’agit de permettre à Canal+ ou BeIn Sports de miser plus, malgré une situation financière encore délicate, en leur proposant le moment venu de revendre des matchs à des concurrents.

« Mieux remplir les stades et attirer un nouveau public »

Pour séduire un maximum de monde, la LFP a décidé de bouleverser la programmation du championnat à partir de 2020. Aux deux matchs du vendredi et du dimanche 21 heures s’ajoute une troisième soirée « premium », le samedi à 21 heures. En outre, la journée du dimanche est sensiblement renforcée, avec un match supplémentaire à 13 heures, un horaire qui convient aussi aux retransmissions en Asie, et quatre autres à 15 heures.

« Nous souhaitons mieux remplir les stades et attirer un nouveau public de femmes et de familles », a précisé Didier Quillot. Sept lots seront commercialisés, dont quatre incluant des événements, des magazines et des extraits. Les trois principaux lots comprennent les 38 journées de championnat et se partagent les cases horaires et les différentes affiches.

Si le prix de réserve d’un ou de plusieurs lots n’est pas atteint, la LFP se réserve le droit de ne pas les attribuer, et de procéder dans quelques mois à une nouvelle mise en vente. Jusque-là, la LFP avait la possibilité d’attribuer les lots même si le prix plancher n’était pas atteint.

Le rêve des clubs : accroître « significativement », selon les termes de Didier Quillot, les revenus de ses clubs et leur donner de la visibilité sur les années à venir. Pour la période 2016-2020, les droits télévisés rapportent au football français 762 millions d’euros par an, bien moins que la Premier League anglaise (2,3 milliards d’euros) ou la Liga espagnole (1 milliard d’euros). D’après les estimations, la LFP rêve de porter la facture au milliard d’euros annuel.