Documentaire sur Histoire à 20 h 40

John Philip Holland à bord du sous-marin « Holland-6 », vers 1900. / HISTOIRE

Réalisateur et scénariste irlandais, Macdara Vallely rend, à travers ce documentaire mêlant documents d’archives du début du XXe siècle et scènes reconstituées, un hommage à son compatriote John Philip Holland : le génial inventeur du sous-marin dont la notoriété est demeurée toute relative. Même si la puissante marine de guerre américaine lui voue une éternelle reconnaissance.

Rien pourtant ne semblait annoncerun tel destin chez cet ingénieur pugnace, passionné de technologie, né en 1841 sur la côte ouest de l’Irlande. Gamin, il montait à bord de la petite embarcation de son père, garde-côte, qu’il accompagnait lors de ses tournées. « Et s’il existait un monde sous-marin ? », se serait interrogé le petit Holland en scrutant les eaux glacées.

Cagnotte révolutionnaire

Autodidacte, formé chez les frères chrétiens, le jeune homme est recalé à son brevet de navigation en raison de sa myopie. Professeur de sciences dans une école religieuse de Cork, il ne cesse de rêver à une embarcation capable d’aller sous l’eau. En 1873, il quitte l’enseignement pour rejoindre l’un de ses frères en Amérique. Un accident lui fait passer trois mois à l’hôpital, le temps pour lui de peaufiner ses croquis et ses études.

En 1874, il se voit proposer un poste d’enseignant à Paterson (New Jersey), capitale de l’industrie ferroviaire américaine. Là, il se lie d’amitié avec les ­Fenians, des indépendantistes irlandais qui ont fait des Etats-Unis leur base arrière en vue de frapper l’Angleterre honnie. Grâce à une cagnotte révolutionnaire, John Philip Holland se voit confier des fonds pour mener à bien ses recherches sur une nouvelle arme de guerre sous-marine. A l’époque, cela relève de la science-fiction, mais il y croit. Tout comme les Fenians, qui rêvent de couler des bateaux britanniques au large des côtes américaines.

Après plusieurs tentatives infructueuses, le rêve devient réalité : le 6 juin 1878, le Holland-1 (cinq mètres de long sur un mètre de large) est le premier d’une série de sous-marins dessinés par l’in­génieur. Après de multiples amé­liorations apportées au blindage ou au centre de gravité fixe, le ­Fenian-Ram (« bélier Fenian »), doté d’un canon d’attaque à air comprimé et de trois places à bord, est lancé en 1881. Lorsqu’il teste son invention dans le port de New York, la foule est dense et la presse inquiète : « On suppose que l’engin submer­sible doit servir à attaquer des ­bateaux britanniques », peut-on lire dans un article.

La Navy pour client

La suite des aventures est une incroyable lutte entre révolutionnaires irlandais, espions britan­niques et profiteurs de guerre. ­Ravis de montrer de quoi est capable le génie irlandais, les Fenians ne se cachent plus. Mais l’efficacité des espions britanniques et des problèmes d’argent vont mettre un terme aux relations entre Holland et les Fenians.

Quelques années plus tard, marié et employé comme dessinateurindustriel, il remporte un concours organisé par l’US Navy. Des investisseurs le soutiennent, lui offrent argent, ouvriers, chantier. Les affaires décollent et Holland donne à l’US Navy ses premiers sous-marins, dépeints par les journa­listes comme « une arme de guerre terrifiante ». Ironie de l’histoire, le modèle Holland-6 sera, au début du XXsiècle, vendu à plusieurs flottes de guerre étrangères… dont la Royal Navy britannique !

John Philip Holland, inventeur du sous-marin, de Macdara Vallely (Irlande, 2017, 50 min).