Une infirmière allemande du Comité international de la Croix-Rouge (CICR) a été enlevée, mercredi 2 mai au soir, dans les locaux de l’organisation à Mogadiscio par des hommes en armes qui ont bénéficié de complicités internes, selon les premiers éléments de l’enquête.

« Nous sommes profondément inquiets pour la sécurité de notre collègue », a déclaré dans un communiqué Daniel O’Malley, directeur adjoint du CICR pour la Somalie. « C’est une infirmière qui travaille tous les jours pour sauver des vies et soigner les gens les plus vulnérables en Somalie », a-t-il ajouté. Le CICR a indiqué être « en contact avec les autorités pour essayer d’obtenir sa libération ».

Selon la Croix-Rouge, l’attaque a eu lieu vers 20 heures (17 heures GMT), lorsque des inconnus armés ont pénétré dans ses locaux à Mogadiscio. Des Somaliens travaillant pour le CICR à Mogadiscio ont indiqué à l’AFP que les ravisseurs avaient pénétré dans l’enceinte de l’ONG par une porte située à l’arrière et emmené de force l’infirmière dans un véhicule.

Deuxième attaque en deux semaines

Selon le porte-parole du ministère de la sécurité, les ravisseurs ont bénéficié de complicités en interne. « Il y a une enquête en cours et les premiers éléments obtenus conduisent pour le moment à penser que l’un des gardes de sécurité [des locaux du CICR] est impliqué dans l’enlèvement », a déclaré à la presse Abdilaziz Ali Ibrahim.

« Les forces de sécurité se sont mises à la poursuite des ravisseurs et ont trouvé une voiture abandonnée qui a été utilisée pour l’enlèvement », a-t-il précisé. Le véhicule en question a semble-t-il été victime d’une crevaison ou d’un problème mécanique, contraignant les kidnappeurs a en changer, selon des sources concordantes. On ignore encore si les ravisseurs ont quitté Mogadiscio ou s’ils s’y dissimulent avec leur otage.

Cet enlèvement constitue la deuxième attaque en moins de deux semaines contre un employé du CICR. Abdulhafid Yusuf Ibrahim, un Somalien qui travaillait pour l’organisation depuis cinq mois, a été tué le 25 mars dans l’explosion d’un engin piégé placé sous son véhicule alors qu’il quittait les locaux du CICR. Jeudi, le CICR a fait évacuer deux ressortissants étrangers et plusieurs employés somaliens de ses locaux, selon un membre de l’équipe qui a souhaité conserver l’anonymat.

Les enlèvements d’étrangers, souvent travailleurs humanitaires ou journalistes, se sont raréfiés ces dernières années en Somalie mais demeurent toujours une menace. Ils sont le plus souvent le fait de milices ou des islamistes radicaux chabab, qui négocient leur libération contre d’importantes rançons, parfois au terme de plusieurs années de captivité.

Guérilla et attentats-suicides

Les Chabab tentent depuis 2007 de renverser le fragile gouvernement central somalien, soutenu par la communauté internationale et par les plus de 20 000 hommes de la force de l’Union africaine, l’Amisom.

Chassés de Mogadiscio en août 2011, les Chabab ont ensuite perdu l’essentiel de leurs bastions. Mais ils contrôlent toujours de vastes zones rurales d’où ils mènent des opérations de guérilla et des attentats-suicides, jusque dans la capitale et contre des bases militaires somaliennes ou étrangères. Les organisations humanitaires internationales, qui s’appuient dans leurs équipes sur de nombreux Somaliens, sont considérées par les Chabab comme des soutiens du gouvernement fédéral.

A la différence de ceux de nombreuses ONG internationales et agences humanitaires de l’ONU opérant en Somalie, les locaux du CICR sont en ville et non pas dans l’enceinte de l’aéroport international, relativement bien protégé par les soldats de l’Amisom. L’aéroport fait office de zone verte pour des ambassades et les agences de l’ONU qui coordonnent la réponse humanitaire aux différentes crises qui secouent le pays : déplacements de population en raison du conflit, malnutrition à grande échelle liée à la situation sécuritaire, aux sécheresses à répétition ou aux inondations.

Le ministre allemand des affaires étrangères, Heiko Maas, actuellement en tournée en Afrique de l’Est, a déclaré à la presse à Addis-Abeba qu’il se refusait à commenter « toute situation d’otages ». « J’ai un immense respect pour toutes les personnes, en particulier les ressortissants allemands, qui travaillent à l’étranger pour venir en aide à d’autres populations », a ajouté M. Maas.