Le congrès du Rassemblement des républicains (RDR), la formation du président Alassane Ouattara, a entériné, le 5 mai, le projet de création d’un grand parti « unifié » avec ses alliés au pouvoir. Le chef de l’Etat, qui a fait de cette union politique un véritable cheval de bataille, a expliqué : « Depuis 2010, nous avons été ensemble et nous avons gouverné ensemble. Et c’est ce que je souhaite que nous puissions continuer de faire. […] Continuer de gouverner la Côte d’Ivoire ensemble, pas seulement jusqu’en 2020, mais au-delà de 2020. »

De quoi s’agit-il ? Pour s’imposer lors des élections présidentielles de 2010 et de 2015, le RDR d’Alassane Ouattara avait constitué avec quatre autres formations politiques – le Parti démocratique de Côte d’Ivoire (PDCI), l’Union pour la démocratie et pour la paix en Côte d’Ivoire (UDPCI), l’Union pour la Côte d’Ivoire (UPCI) et le Mouvement des forces d’avenir (MFA), rejoints en 2016 par le Parti ivoirien des travailleurs (PIT) – une coalition, le Rassemblement des houphouëtistes pour la démocratie et la paix (RHDP). Alliance que le chef de l’Etat souhaite aujourd’hui transformer en une seule et même formation, au sein de laquelle « aucun parti membre ne disparaîtra ».

Vainqueurs à l’applaudimètre

Point de véritables débats lors de ce congrès, encore moins de suspens ou de déclarations fracassantes. Il est tout de même possible d’en retirer quelques enseignements.

Tout d’abord, la capacité de mobilisation du RDR, après huit ans au pouvoir, reste très importante. Et si, comme à chaque congrès, les critiques relèvent que tout a été fait pour escorter le maximum de militants peu regardants venant de villes secondaires, force est de constater que le Palais des sports d’Abidjan était plein à craquer. Et que le ban et l’arrière-ban du parti avaient répondu présent.

Deuxièmement, si ce congrès avait été un concours de popularité jaugée à l’applaudimètre, les deux vainqueurs auraient été – et de loin – Alassane Ouattara suivi du président de l’Assemblée nationale, Guillaume Soro. « Anecdotique », « insignifiant » pour certains, « révélateur des rapports de force en construction » pour d’autres. Soro, qui avait boycotté le congrès de septembre 2017 à la suite, notamment, du renvoi de leurs postes de plusieurs de ses proches, ne s’est toutefois pas exprimé publiquement.

« Pas une obligation »

Enfin, le flou règne encore sur les modalités de construction et sur les contours du futur parti unifié. Si le chef de l’Etat a demandé à la direction du RDR d’en « déposer » les textes fondateurs au ministère de l’intérieur, nul ne sait encore combien de formations politiques participeront finalement à l’aventure. « Le RHDP n’est pas une obligation, il se fera avec ceux qui le voudront », a toutefois ajouté Alassane Ouattara.

Si le PIT a adhéré au projet le 29 avril, les cadres de l’UPCI avaient, la veille, clairement rejeté toute idée de parti unifié. L’UDPCI et le MFA tiendront leur congrès dans les jours à venir pour se prononcer sur la question. Reste le cas du PDCI, l’autre poids lourd (avec le RDR) de la coalition, qui n’a encore annoncé ni congrès ni convention spécifique pour la ratification des textes du futur parti. Un congrès qui s’avérerait risqué, tant les cadres de cette formation semblent aujourd’hui divisés sur la question.

Et ce n’est pas l’annonce, faite en filigrane lors de ce congrès du 5 mai par le président Ouattara, de primaires au sein du futur parti en vue de la présidentielle de 2020 qui favorisera le mariage tant attendu avec le PDCI. Bien au contraire. La formation de l’ancien chef de l’Etat Henri Konan Bédié tient mordicus à choisir en interne son propre candidat et compte bien voir ses alliés se ranger derrière lui, comme ce fut le cas pour Alassane Ouattara lors des deux précédents scrutins présidentiels.

Le processus de création du parti unifié est « irréversible » titrait fièrement le magazine du RDR, distribué dans les allées du congrès. Pas sûr que tous les alliés en aient la même lecture…