Carles Puigdemont (ici à Berlin le 5 mai) attend en Allemagne une éventuelle extradition vers l’Espagne qui veut le juger pour « rébellion ». / Christophe Gateau / Christophe Gateau/dpa

Nouveau rebondissement dans le feuilleton qui déchire l’Espagne et la Catalogne depuis des mois. Le gouvernement espagnol est intervenu, mercredi 9 mai, pour barrer la route à une réélection de l’ex-président indépendantiste de Catalogne Carles Puigdemont à la tête de l’exécutif régional, forçant les séparatistes à présenter un nouveau candidat s’ils veulent, enfin, former un gouvernement.

Le conseil des ministres a décidé de saisir la Cour constitutionnelle pour qu’elle annule une loi votée la semaine dernière au Parlement catalan qui permettrait d’investir en son absence l’ex-président, qui attend en Allemagne une éventuelle extradition vers l’Espagne qui veut le juger pour « rébellion ».

« Aucun candidat à la présidence de la Generalitat ne peut être investi sans être présent au Parlement de Catalogne », a-t-il expliqué. Dès lors que la Cour constitutionnelle, qui avait déjà interdit une investiture en l’absence du candidat, acceptera d’examiner le recours, le texte sera suspendu, a rappelé le porte-parole.

Les indépendantistes ont remporté les élections régionales en décembre, mais s’ils n’élisent pas un nouveau président d’ici au 22 mai, les Catalans seront automatiquement rappelés aux urnes.

Les partisans de Carles Puigdemont avaient annoncé, samedi, leur intention de tenter une dernière fois d’investir l’ex-président, après une première tentative fin janvier, bloquée par la justice.

Mais ils ont reconnu que s’ils n’y parvenaient pas, ils présenteraient une candidature alternative pour débloquer la situation, près de huit mois après la mise sous tutelle de la Catalogne par le gouvernement central.

« Jouer les victimes »

Le chef du gouvernement Mariano Rajoy avait annoncé dans la matinée ce recours contre la loi votée vendredi par les indépendantistes, malgré l’avis défavorable des juristes du parlement régional.

« Nous allons contester une décision qui permet qu’un fugitif, vivant à l’étranger, puisse être investi. (…) C’est absurde », avait-il déclaré. Les indépendantistes catalans n’ont jusqu’ici proposé à la présidence de la région que des candidats, dont la justice a bloqué l’investiture.

Leurs adversaires les accusent de présenter délibérément des candidatures inéligibles pour « jouer les victimes ». « Ce n’est de la faute ni de l’Etat, ni du gouvernement, ni des juges, ni de cette chambre, si vous êtes incapables de former un gouvernement », a lancé Mariano Rajoy à un élu indépendantiste au Sénat.

Pour les séparatistes, les poursuites pour rébellion de la Cour suprême, passibles de trente ans de prison, sont injustifiées et les neuf indépendantistes en détention provisoire sont des « prisonniers politiques ».

Outre M. Puigdemont, qui s’était réfugié en Belgique après la tentative de sécession, ils ont proposé Jordi Sanchez et Jordi Turull, incarcérés. La justice a refusé de les laisser sortir de prison pour se présenter à un débat d’investiture.

Tous sont poursuivis pour « rébellion » pour leur rôle dans la tentative de sécession du 27 octobre. Le gouvernement central avait placé dans la foulée la Catalogne sous administration directe, destitué M. Puigdemont et son gouvernement et convoqué des élections anticipées en décembre.

Carles Puigdemont, qui avait mené campagne pour la « restitution du gouvernement légitime » de la Catalogne, avait remporté une victoire surprise et les indépendantistes avaient conservé leur majorité absolue au Parlement catalan. Les indépendantistes n’ont, pour l’heure, pas dévoilé l’identité du candidat alternatif qui permettrait de débloquer la situation.