La « doctrine Nétanyahou » triomphe. C’est par cette formule que le quotidien (centre gauche) Haaretz accueille le discours de rupture tenu par Donald Trump vis-à-vis de l’Iran. Le journaliste Anshel Pfeffer, qui vient de publier une bibliographie très remarquée du premier ministre israélien, estime que le président des Etats-Unis a été sous l’influence de sa vision martiale. La volonté de renier tout l’héritage de son prédécesseur, Barack Obama, ne serait qu’un ressort parmi d’autres. Au fond, les deux hommes auraient désormais en partage un plan non avoué : faire tomber le régime iranien.

« Le scénario rêvé est une version plus réduite de la désintégration de l’Union soviétique au début des années 1990, écrit-il. De la même façon que les héros de Nétanyahou, Ronald Reagan et Margaret Thatcher, se sont dressés face aux Soviétiques et les ont poussés dans une course à l’armement qui a ruiné Moscou et brisé l’URSS, il croit que les sanctions peuvent aboutir au même résultat avec l’Iran. »

Dans le quotidien conservateur Jerusalem Post, Yonah Jeremy Bob revient aussi sur les motivations de Donald Trump. « Sa stratégie n’est clairement pas de placer des pansements sur les trous de l’accord et de demander à l’Iran de bien se comporter par l’intermédiaire de l’Union européenne, pour s’accorder sur des corrections. Et les observateurs qui disent qu’il était seulement intéressé par le fait de tenir une promesse de campagne passent à côté d’une partie de l’esprit de son discours, ainsi que des recrues récentes de Trump au sein de son équipe de sécurité nationale. »

Le journaliste fait ainsi référence à John Bolton, partisan de longue date de pressions puissantes sur le régime iranien.

« Deux cadeaux à Israël »

Dans The Times of Israel, Raphael Ahren, le correspondant diplomatique du quotidien, souligne les grandes incertitudes qui se dessinent pour la suite, malgré la victoire de la ligne Nétanyahou et la revanche prise contre Barack Obama, dont l’héritage est mis en pièces. Mais l’administration américaine pourrait aussi présenter une forme d’addition à Israël.

« Trump a donné à présent deux cadeaux à Israël : le déplacement de l’ambassade à Jérusalem et l’abandon de l’accord iranien, écrit-il. Il est possible qu’il demandera en retour des concessions israéliennes, une fois qu’il aura enfin dévoilé son plan pour l’accord de paix ultime avec les Palestiniens. Et cet accord-là, Nétanyahou aura du mal à convaincre Trump de l’abandonner. »

Mais la plus grande réserve exprimée dans la presse concerne le front nord, la frontière avec la Syrie, où Israël veut empêcher une implantation militaire durable de l’Iran. Or l’administration Trump a clairement fait savoir qu’elle souhaitait un retrait des forces américaines déployées dans ce pays.

Dans le quotidien conservateur Yediot Aharonot, l’expert des questions militaires, Alex Fishman, estime que Donald Trump « se moque de ce qui se produit après le spectacle ». Il écrit ceci : « Si quelqu’un en Israël a rêvé d’une attaque américaine contre Fordo [site nucléaire souterrain] ou d’une déclaration de guerre contre l’Iran – tout cela parce que des missiles iraniens auraient été tirés de Syrie vers une base militaire en Israël –, laissez tomber. Nous sommes seuls sur le front nord. Toutes les réponses ne viendront que de nous, et nous en serons entièrement responsables. »

Dans le même journal, Amos Yadlin, ancien chef du renseignement militaire et directeur de l’Institut pour les études nationales de sécurité (INSS), note pour sa part que « sans un large soutien international pour des sanctions dures et efficaces, la seule option pour arrêter l’Iran sera l’action militaire ».