L’alliance de l’opposition menée par Mahathir Mohamad, 92 ans, a remporté les élections législatives mercredi 9 mai en Malaisie, mettant un terme à six décennies de la coalition au pouvoir sans interruption depuis l’indépendance. Selon les résultats officiels fournis par la commission électorale, l’alliance de l’opposition, Pakatan Harapan, avec un parti allié dans l’Etat de Sabah à Bornéo, a remporté 115 sièges, soit plus que la majorité simple de 112 sièges nécessaire pour former un gouvernement.

Mahathir Mohamad, qui deviendra le plus vieux premier ministre au monde, a déclaré à la presse ne pas chercher « la revanche. Nous voulons restaurer l’Etat de droit ». Il a dirigé la Malaisie d’une main de fer pendant vingt-deux ans et a quitté sa retraite pour se lancer dans la campagne pour les législatives. Dès que la victoire de l’opposition est apparue clairement, les partisans de M. Mahathir se sont répandus dans les rues pour manifester leur joie, en agitant des drapeaux à leurs couleurs.

Le premier ministre englué dans un scandale financier

Le premier ministre, Najib Razak, 64 ans, qui dirigeait la coalition progouvernementale Barisan Nasional (Front national, BN), était englué dans un scandale financier. Le BN dirige la Malaisie depuis son indépendance du Royaume-Uni, en 1957. Plusieurs décomptes non officiels faisaient état depuis quelques heures de la forte progression de l’opposition dans certaines régions du pays.

Le retour surprise sur le devant de la scène politique du charismatique ex-premier ministre Mahathir Mohamad a bouleversé le paysage politique du pays. Excédé par un énorme scandale financier qui a sapé l’image de la Malaisie à l’étranger, M. Mahathir s’est allié à des partis qui lui étaient opposés du temps où il était au pouvoir (1981-2003), en particulier avec un dirigeant de l’opposition emprisonné, Anwar Ibrahim, ex-ennemi juré du nonagénaire.

La coalition d’opposition avait gagné du terrain ces dernières semaines. Elle a rogné sur le socle électoral des partis au pouvoir, les Malais musulmans, qui forment la population majoritaire de cet Etat multiethnique d’Asie du Sud-Est.

La participation était de 69 % deux heures avant la clôture du scrutin, a dit la commission électorale.

Sous pression

Les électeurs sont de plus en plus désabusés par les politiques qui sèment la division entre groupes ethniques, par l’augmentation du coût de la vie et par des scandales de corruption.

L’affaire de détournements au détriment du fonds souverain 1MDB, créé par M. Najib à son arrivée au pouvoir, en 2009, pour moderniser la Malaisie, affecte le premier ministre, qui a toujours nié tout acte répréhensible.

Depuis 2015, la Malaisie est secouée par le scandale autour de ce fonds endetté aujourd’hui à hauteur de 10 milliards d’euros. Il est au cœur d’allégations de corruption qui font l’objet d’enquêtes dans plusieurs pays, notamment en Suisse, à Singapour et aux Etats-Unis.

Des partisans de l’opposition et des représentants de la société civile ont dénoncé des tentatives de triche de la part de la coalition au pouvoir, affirmant que des millions d’électeurs sans adresse et même des personnes décédées étaient apparus sur les listes électorales, à la suite d’un redécoupage électoral en mars, favorable à la coalition au pouvoir.