Donald Trump après l’annonce du retrait américain de l’accord sur le nucléaire iranien, à la Maison Blanche, le 8 mai 2018. / Jonathan Ernst / REUTERS

Donald Trump a accueilli en grande pompe, jeudi 10 mai, trois Américains libérés par Pyongyang après qu’ils ont passé des mois dans les prisons nord-coréennes. Mais d’autres prisonniers américains détenus à l’étranger sont inquiets de leur sort après l’annonce du président américain, deux jours plus tôt, de la sortie des Etats-Unis de l’accord sur le nucléaire iranien.

Selon les organisations de défense des droits humains, la République islamique d’Iran compte une trentaine de détenus à double nationalité, dont au moins cinq Irano-Américains. Leurs familles redoutent que la montée des tensions entre les deux pays ne nuise au sort de leurs proches et qu’elle ne retarde encore plus leur libération. Mercredi, plusieurs de ces familles ont demandé publiquement à Washington d’engager avec Téhéran des pourparlers « humanitaires » pour obtenir leur rapatriement.

Accord nucléaire iranien : Donald Trump annonce le retrait des Etats-Unis
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Parmi eux figurent l’homme d’affaires Siamak Namazi et son père, Mohammad Bagher, tous les deux condamnés en octobre 2016 à dix ans de prison pour « espionnage » au profit de Washington. Depuis leur arrestation – par les gardiens de la révolution et non pas par le ministère du renseignement, qui opère sous l’autorité du président modéré, Hassan Rohani –, la Maison Blanche a, à de multiples reprises, demandé leur rapide rapatriement vers les Etats-Unis en brandissant la menace de nouvelles sanctions. Or Téhéran s’y est toujours opposé, évoquant l’indépendance de son système judiciaire.

« Haute priorité »

Mercredi, Babak Namazi, un autre fils de Mohammad Bagher, a déclaré avoir rencontré deux hauts responsables de la Maison Blanche et avoir fait part des préoccupations de sa famille. « On m’a assuré que l’administration continue de traiter ma famille et d’autres otages avec une haute priorité, a précisé Babak Namazi, qui vit aux Etats-Unis. Tout ce qui compte pour moi, c’est le retour immédiat et en toute sécurité de mes proches. »

Ces derniers mois, les gardiens de la révolution ont tout particulièrement visé les Irano-Britanniques, avec deux arrestations durant le seul mois d’avril. Il s’agit de l’académicien en sciences informatiques et mathématiques à l’Imperial College de Londres Abbas Edalat et de l’analyste politique et écrivain Mahan Abedin.

Le premier, également à l’origine du groupe Campagne contre les sanctions et l’intervention militaire en Iran, s’était rendu à Téhéran pour participer à un séminaire académique lorsqu’il a été arrêté. Lors d’une conférence de presse, le 29 avril, le porte-parole de la justice, Gholam Hossein Mohseni Ejei, a confirmé son arrestation « pour des accusations sécuritaires », sans avancer plus de détails.

Mahan Abedin, lui, est connu pour ses positions anti-américaines, parfois très favorables à la République islamique d’Iran, ce qui rend son arrestation d’autant plus étonnante. Une autre Irano-Britannique, Nazanin Zaghari-Ratcliffe, chef de projet pour l’organisation caritative de la Fondation Thomson Reuters, est détenue en Iran depuis 2016. Cette femme de 38 ans a été condamnée à cinq ans de prison pour « propagande contre la République islamique d’Iran ».

Monnaie d’échange

Dans les cercles diplomatiques, on estime que l’Iran garde en détention ces Irano-Britanniques pour obliger le Royaume-Uni à rembourser une dette liée à une facture impayée de vente d’armes interrompue au moment de la révolution islamique, en 1979.

D’une manière plus générale, il semblerait que les binationaux restent une cible privilégiée pour Téhéran, qui peut les utiliser comme monnaie d’échange dans les différends politiques et économiques qui l’opposent aux pays occidentaux.

En janvier 2016, au moment où l’accord nucléaire est entré en vigueur, l’Iran et les Etats-Unis ont ainsi réalisé un échange de prisonniers. En avril, juste avant l’annonce de Donald Trump, le ministre des affaires étrangères iranien, Mohammad Javad Zarif, avait déclaré que l’Iran était ouvert aux négociations de prisonniers « si les Etats-Unis changeaient d’attitude », une manière pour Téhéran de tenter de convaincre Washington de rester dans l’accord. Aujourd’hui, la perspective d’une libération des détenus binationaux est plus que jamais improbable.

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