MARIO WAGNER

Quelle sera la banque des « millennials » ? Pour capter cette clientèle stratégique, les candidats sont nombreux : banques traditionnelles, banques en ligne nées avec Internet et néobanques, surtout utilisées par des jeunes sur leur smartphone. Le Compte-Nickel, lancé en 2014 avant d’être racheté en 2017 par BNP Paribas, revendique 860 000 adeptes, contre 115 000 pour le compte C-zam (Carrefour), 220 000 clients pour le britannique Revolut et 200 000 pour l’allemand N26 (à fin janvier). Lancé en novembre, Orange Bank compte 100 000 convertis, avec un objectif de 2 millions dans dix ans. La moitié des nouveaux comptes bancaires créés en 2018 devraient ainsi échapper aux banques traditionnelles.

Les interfaces des applications de ces acteurs nés à l’ère des smartphones répondent parfaitement aux canons des millennials, ce qui est loin d’être le cas de celles des banques traditionnelles, régulièrement mal notées par leurs utilisateurs. Surtout, elles s’adaptent à leur mode de vie. « Par exemple, les néobanques offrent la possibilité d’ouvrir un compte en quelques minutes sur son mobile depuis son canapé, même un dimanche », note Maxime Chipoy, responsable de Meilleurebanque.com.

D’autres spécificités expliquent leur succès : transfert d’argent instantané, cagnotte pour partager des dépenses entre amis, frais réduits à l’étranger, pilotage de sa carte bancaire en temps réel… « Ces services gratuits séduisent les jeunes. Les horaires d’ouverture des agences bancaires ne font pas partie de leur monde, poursuit M. Chipoy. En outre, la facturation opaque des banques traditionnelles est pour eux un repoussoir. Les millennials veulent de la transparence et savoir pour quoi ils paient. »

Nouveaux modes de paiement

Sentant le danger, plusieurs grands réseaux bancaires (Caisse d’épargne, Banque populaire, Crédit mutuel Arkéa, BNP ­Paribas, Crédit agricole) offriront avant la fin de l’année la possibilité de réaliser des virements en temps réel entre particuliers sept jours sur sept. Reste à savoir si ces banques traditionnelles répercuteront le coût de ce nouveau mode de paiement sur leur clientèle, elles qui doivent gérer des bases de données et des systèmes infor­matiques parfois vieux de trente ans.

Si l’engouement pour les néobanques est indéniable, leur offre est toutefois trop limitée pour qu’elles remplacent les banques traditionnelles. Pour l’instant, ­elles se limitent au compte courant (gratuit) et à quelques cartes bancaires avec leur assurance. Pas de chéquier ni de découvert, aucun produit d’épargne. Seule Orange Bank propose des chéquiers, du découvert et du crédit à la consommation, tandis que Revolut va bientôt lancer une facilité de caisse et des placements. « Nous développons une offre de crédit à la consommation avec Younited Credit. A terme, nous proposerons tous les services financiers », promet Jérémie Rosselli, directeur général de N26 en France.

56 %

C’est la part des 18-24 ans qui sont demandeurs d’accompagnement de la part de leur banquier sur des problématiques d’aides financières intergénérationnelles, contre 39 % chez l’ensemble des Français, selon une étude menée par l’institut Elabe pour le cabinet de conseil Wavestone. D’une manière générale, les plus jeunes souhaitent que leur banque joue un rôle plus important dans des moments-clés de leur vie. Ils sont ainsi plus nombreux à souhaiter être davantage conseillés dans des périodes de licenciement (54 % contre 42 % chez l’ensemble des Français), lors de la naissance d’un enfant (40 % contre 23 %), lors d’un mariage (29 % contre 17 %) ou encore lors d’un projet de vacances (22 % contre 13 %). L’étude a été menée auprès d’un échantillon représentatif de la population française de 1 000 individus âgés de 18 ans et plus, interrogés les 13 et 14 mars 2018.

Des offres qui doivent encore s’étoffer

De fait, le positionnement des néobanques se limite actuellement à la banque du quotidien, celle qui facilite les transactions de la vie courante. Etoffer les offres prendra du temps. Il a fallu vingt ans à Boursorama pour développer une gamme complète d’une trentaine de produits et services, à des tarifs planchers. En tête des banques en ligne, la filiale de la Société générale apparaît comme un bon compromis entre la banque traditionnelle et les pionniers de révolution numérique. Elle bénéficie d’un solide bouche-à-oreille, un aspect essentiel pour une génération habituée aux dialogues en groupe sur Internet. « Nous avons capté 22 300 clients supplémentaires au cours des six derniers mois, et 39 % ont moins de 25 ans », se réjouit le directeur général, Benoît Grisoni. Même si son appli n’a pas le glamour de celle de N26 ou de révolu, Boursorama a su faire évoluer son offre pour séduire les jeunes.

Reste une inconnue majeure : le poids dans ce secteur des géants Apple, Google, Amazon et Facebook. Avec son offre Apple Pay, le groupe de Cupertino a pris une longueur d’avance dans les paiements, mais ce n’est qu’un intermédiaire qui se rémunère auprès des banques, de même que Google ne propose qu’un système de paiement concurrent de Visa et Mastercard. A terme, les concurrents les plus sérieux pourraient être Facebook, qui va offrir à ses utilisateurs la possibilité de s’échanger de l’argent sur Messenger, et Amazon, le roi du commerce électronique, qui ambitionne de contrôler les paiements effectués sur son site.

Ce que dit la loi : ouvrir un compte bancaire quand on est mineur

Les mineurs peuvent, sous certaines conditions, détenir un compte bancaire. La loi fixe à 16 ans l’âge légal minimum pour en ouvrir un. Ce n’est qu’à partir de cet âge qu’un enfant mineur acquiert le droit d’effectuer seul des dépôts et retraits sur son compte et que des moyens de paiement (carte de retraits essentiellement) peuvent être mis à sa disposition, sauf indication contraire de ses parents (ou de son tuteur). Pour l’ouverture du compte, le mineur de 16 ans doit impérativement être accompagné de ceux-ci (ou de celui-ci). Leur présence est indispensable parce qu’ils doivent se porter caution au cas où le compte en banque se retrouverait à découvert. Dans ce cas, la banque peut se tourner vers eux pour exiger le remboursement des dettes. A partir de 18 ans, la présence et l’accord des parents ne sont plus nécessaires. A noter : les mineurs émancipés, les mineurs de plus de 16 ans qui sont salariés ou qui bénéficient d’une bourse d’études peuvent ouvrir et gérer un compte seuls.