Sélection officielle, hors compétition

La raréfaction des stars et des studios hollywoodiens au Festival de Cannes devrait ôter l’envie aux mauvais esprits de se demander ce que peut bien y faire un épisode de Star Wars dirigé par Ron Howard – déjà réalisateur d’un Da Vinci Code de sinistre mémoire en ouverture cannoise en 2006. On entrera donc directement dans le vif stellaire du sujet, en rappelant que depuis le rachat dispendieux de la saga par la firme Disney en 2012, les huiles de Mickey turbinent pour étudier tout moyen utile d’un retour rapide sur investissement.

Il en est ressorti l’idée merveilleuse de « l’univers étendu » (spin off), qui ajoute au flux de la saga proprement dite l’agrément d’excursions ponctuelles. Après le décevant et morbide Rogue one (Gareth Edwards, 2016) autour d’une intrigue non développée de l’épisode IV, c’est aujourd’hui le tour de Solo, qui porte sur la jeunesse d’un des protagonistes les plus sympathiques de la saga, l’as de la conduite spatiale Han Solo, jadis interprété par le fringuant Harrison Ford.

On vous parle donc d’un temps où Han ignorait qu’il emballerait la princesse Leia, qu’ils auraient un fils ensemble, que celui-ci porterait, une fois grandi et passé du côté grincheux de la force, le nom ridicule de Kylo Ren et la tête d’Adam Driver, qu’il se convertirait tel Œdipe aux joies insouciantes du parricide, et que sa pauvre mère, sur ses vieux jours, en viendrait à devoir se sacrifier pour sauver les forces du bien. L’aurait-il seulement approchée, la princesse, si Solo avait su cela ? Cela aurait pu être le magnifique sujet de philosophie du film. Il n’en sera rien.

Faire plaisir aux fans

A la place, nous trouvons un récit standard du type « c’est le désordre », de la pénurie partout, des trafics dans tous les sens, la loi de la jungle dans tous les coins. Sur ce fond, se dégage la figure du jeune Han, jeune flibustier qui va se trouver mêlé à un vol de carburant pour le compte d’une super-organisation maffieuse soutenue par l’Empire, tandis que la femme qu’il aime depuis toujours est devenue l’adjointe d’un cruel dément qui travaille pour le compte de cette organisation, et que la résistance, par ailleurs, s’organise.

Affaire complexe en apparence, mais assez simple sur le fond : trop d’action numérique hors sol, pas assez de vrais personnages. L’enjeu consiste essentiellement à faire plaisir aux fans et à renouer les fils du personnage : comment Solo (Alden Ehrenreich) a rencontré son compagnon Chewbacca le singe poilu, comment il s’est fait rouler par son futur ami Lando Calrissian (Donald Glover), comment il finit par lui piquer aux cartes le vaisseau le plus sexy de la galaxie, le Faucon Millenium.

Quelques personnages nouveaux s’introduisent, dont Beckett dans la catégorie mentor suborneur (Woody Harrelson) et Qi’ra dans celle de la fiancée perdue (Emilia Clarke en brune à frange, dont on pressent qu’elle pourrait ne jamais se débarrasser de la Daenerys mère des dragons de Game of thrones). Léger problème : tout le monde semble ailleurs, à commencer par l’avenant Alden Ehrenreich qui fait hélas un Solo désespérément insipide. Encore heureux que celui-ci soit mort avant de se voir ainsi ressuscité. L’objet atterrit le 23 mai sur les écrans de France.

Film américain de Ron Howard. Avec Alden Ehrenreich, Woody Harrelson, Emilia Clarke, Donald Glover(2h15). Sortie en France le 23 mai.