La solution de l’entreprise berlinoise permet d’installer des prises sur les mâts d’éclairage public. Ici en Allemagne, en 2017. / Ubitricity

Les inventions prometteuses procèdent souvent d’une idée simple. Celle d’Ubitricity, une start-up allemande, propose une solution séduisante à un problème crucial : la rareté des bornes de recharge pour voiture électrique qui limite l’attractivité de ce mode de transport d’avenir. Plutôt que d’installer des prises spécifiques, l’innovation consiste à les installer dans n’importe quel mât d’éclairage public. La municipalité londonienne de Hounslow s’est récemment laissé séduire par cette technologie qui redonne une nouvelle vie aux lampadaires. Elle permet aux résidents ne disposant pas de parking privé (43 % des Britanniques) de recharger leur batterie dans la rue.

A l’occasion de la conversion au LED des dispositifs d’éclairage, des prises électriques pour voiture ont été installées. L’économie réalisée grâce aux nouvelles ampoules permet de dégager la puissance nécessaire à cet usage. « Le système évite d’éventrer les trottoirs, il permet une économie conséquente par rapport à des prises spéciales et il est esthétiquement satisfaisant », explique Kieran Taylor, élu chargé des transports à la municipalité de Hounslow, interrogé par le blog Fully charged. La solution est aussi adoptée dans quelques rues des quartiers londoniens de Barnes, Twickenham, Kensington et Westminster.

A première vue, le dispositif, simple, paraît en mesure de résoudre la difficile équation actuelle entre parking et recharge des batteries.

Comme son nom le suggère, Ubitricity vise à faire rimer électricité avec ubiquité. La société, fondée en 2008 à Berlin, fournit à ses clients un câble qui leur permet de se brancher où bon leur semble. La particularité de ce « smart cable » est qu’il comporte un système de transmission de données permettant la facturation à distance. Sans manipulation particulière, l’automobiliste se voit imputer par le fournisseur d’électricité de son choix la stricte consommation de son véhicule. A Hounslow, la municipalité attribue à chaque abonné au système trois prises possibles aux alentours de son domicile. Le système allie donc la mise en commun des prises et l’individualisation de la facturation, qui s’effectue sur le modèle des téléphones portables.

Des réalisations encore modestes

A première vue, le dispositif, simple, paraît en mesure de résoudre la difficile équation actuelle entre parking et recharge des batteries. La crainte de ne pas pouvoir aisément « refaire le plein » d’électricité est identifiée, avec le prix des voitures électriques et leur autonomie, comme l’un des obstacles au développement du marché. La puissance et le prix d’une technologie ne suffisent pas à assurer sa popularité, note un article de la Harvard Business Review : son écosystème participe aussi à sa popularité. Les auteurs mettent l’accent sur le fait que « les infrastructures pour les recharges et la performance des batteries sont insuffisantes pour que le grand public adopte [la voiture électrique] ». Ubitricity pourrait donc accélérer la transition, d’autant que le système permet de choisir un fournisseur d’électricité verte.

Aidée par les pouvoirs publics allemands, la start-up, qui emploie 44 personnes, a déjà attiré l’intérêt d’EDF – l’un de ses actionnaires –, de la compagnie allemande d’électricité verte Grundgrün et du fabricant de composants électroniques américain Tyco Electronics. Ses réalisations sur la voie publique sont encore modestes : quelques dizaines de prises à ­Londres et, en Allemagne, à Berlin et dans les régions de Brême et du lac de Constance.

Astucieuse, la solution proposée par Ubitricity ne constitue pourtant pas une panacée. Les mâts d’éclairage doivent être implantés suffisamment près des trottoirs pour éviter les branchements hasardeux. Les chargeurs rapides ne peuvent pas y être installés et la puissance fournie risque d’être insuffisante aux heures de pointe en cas de succès. Mais avec un marché européen de la voiture électrique en cours de décollage (+ 43,9 % entre 2016 et 2017), où la France se classe deuxième pour les ventes (30 921 véhicules), et une perspective généralisée d’interdiction des véhicules diesel et à essence, les prises d’Ubitricity pourraient rapprocher le moment où rouler « électrique » relèvera de l’évidence.