La HATVP a transmis 19 dossiers à la justice dont 10 pour non-dépôt de déclarations et 9 pour infractions liées aux déclarations. / hatvp.fr

Avec l’élection présidentielle, qui a entraîné le renouvellement du gouvernement et de ses collaborateurs, les élections législatives et les élections sénatoriales, l’année 2017 a été exceptionnelle et a eu pour effet un renouvellement important d’une part significative des déclarants, relève la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique (HATVP).

Dans son rapport d’activité pour l’année 2017, publié jeudi 24 mai, l’HATVP – institution indépendante, créée en 2014 et présidée par Jean-Louis Nadal, ancien procureur général près la Cour de cassation – réclame une publication large des déclarations de patrimoine des parlementaires et plus de transparence dans l’utilisation de l’indemnité pour frais de mandat des parlementaires (l’IRFM).

Une série de propositions

Après des abus dans l’usage de l’IRFM, l’HATVP relève qu’il y a « d’indéniables avancées », mais l’usage de l’indemnité « n’est pas plus transparent dans le nouveau système que dans l’ancien ». Le système a été réformé au début de 2018, avec des règles plus strictes et un contrôle aléatoire des dépenses. Les députés disposent désormais d’une « avance » de 5 373 euros mensuels, dont 600 euros peuvent être dépensés sans justificatifs, les sénateurs de 5 900 euros, dont 885 euros sans justificatifs.

Cette dernière fait une série de onze propositions, demandant notamment une publication « en open data » des relevés de compte consacrés aux frais de mandat, à l’instar de ce qui se pratique en Grande-Bretagne ou aux Etats-Unis, d’autant que « la transparence permet une meilleure appréhension de l’activité des parlementaires ». « En 2017, lors du contrôle de la variation de patrimoine des parlementaires en fin de mandat, la Haute Autorité a été particulièrement attentive à un possible usage irrégulier, voire illicite, de cette indemnité », ajoute-t-elle. A ce stade, elle n’a cependant pas transmis de dossier à la justice pour ce motif.

Elle propose aussi de remplacer la sanction de démission d’office des parlementaires en cas de non-dépôt de leurs déclarations par l’infraction pénale applicable à tous les déclarants.

Des parlementaires ont financé par l’IRFM l’acquisition de leur permanence, intégrée ainsi à leur patrimoine. En février, après le signalement d’une association, une enquête préliminaire a ainsi été ouverte sur des soupçons de détournement de fonds publics, après l’achat puis la mise en vente par Jean-Jacques Urvoas, ex-garde des sceaux et ex-député PS du Finistère, de sa permanence à Quimper.

Concernant les déclarations de patrimoine des députés et sénateurs, la HATVP renouvelle également son souhait d’une plus grande transparence. Ces déclarations-là sont uniquement consultables en préfecture et ne peuvent pas être divulguées, conformément à la législation sur la transparence post-Cahuzac de 2013.

« Cette limitation particulièrement drastique (…) n’est pas satisfaisante au regard de l’objectif visant à renforcer la probité et à prévenir les conflits d’intérêts », selon la HATVP, qui évoque un nombre de consultations « très faible » et suggère une publication sur son site.

Dix-neuf dossiers transmis à la justice

Au total, en 2017, année de fort renouvellement des élus et de certains emplois décidés par le gouvernement, soumis également à son contrôle, la HATVP a reçu 10 622 déclarations de patrimoine et d’intérêts. Sur l’année, elle a enregistré 3,5 millions de pages vues sur son site, un record.

La Haute Autorité, qui compte 50 agents, a aussi reçu 106 signalements de citoyens – un chiffre bien supérieur aux années précédentes – ce qui a, dans un quart des cas, conduit à ouvrir ou rouvrir des dossiers.

Globalement, la HATVP à la suite de ses travaux a transmis 19 dossiers à la justice dont 10 pour non-dépôt de déclarations et 9 pour infractions liées aux déclarations (omission, sous-évaluation de patrimoine, prise illégale d’intérêts…).

Sur ces neuf derniers cas d’infractions, la HATVP a rendu public, entre janvier et décembre, les cas de Noël Mamère, Alain Moyne-Bressand, Patrick Balkany et François-Xavier Villain et Marc Daunis, pour lesquels il existe un « doute sérieux quant à l’exhaustivité, l’exactitude et la sincérité de ces déclarations, du fait de la sous-évaluation de [leur] patrimoine immobilier ». Pour Louis-Constant Fleming, il existe « un doute sérieux quant à l’exhaustivité, l’exactitude et la sincérité de [sa] déclaration, en raison notamment de la sous-évaluation manifeste de certains actifs et de l’omission de certains biens détenus à l’étranger ».

Dans un entretien à l’AFP, Jean-Louis Nadal, une réforme des autorités de contrôle et de transparence de la vie publique.

Pour l’avenir, une grande autorité de la déontologie de la vie publique pourrait reprendre les missions de la HATVP, de la commission des comptes de campagne et de la commission de déontologie de la fonction publique par exemple, pour plus d’efficacité.