Patrice Canayer, porté en triomphe par ses joueurs, a remporté dimanche sa seconde Ligue des champions avec Montpellier. / THILO SCHMUELGEN / REUTERS

Avec trois clubs hexagonaux qualifiés pour le « Final Four » (les demi-finales) de la Ligue des champions de handball, il y avait de fortes chances que la France compte un nouveau club champion d’Europe. Pourtant, au sortir de la finale, il n’y a toujours qu’une seule équipe de l’Hexagone à avoir soulevé le trophée européen.

Quinze ans après sa victoire contre le Pampelune de Jackson Richardson, le Montpellier Handball – où joue Melvyn Richardson, le fils de l’ancienne gloire des Bleus – a remporté sa seconde Coupe d’Europe, dimanche 27 mai, en prenant le dessus sur Nantes en finale (32-26). Battu par les Nantais en demi-finale samedi, le Paris Saint-Germain complète le podium 100 % tricolore après sa victoire contre le Vardar Skopje en petite finale (29-28).

A jamais les premiers, les Montpelliérains du capitaine Michaël Guigou, déjà présent en 2003, ont conclu en beauté un parcours européen les ayant vus s’extirper des poules basses, puis éliminer successivement Barcelone, Flensburg et le tenant du titre macédonien. Un titre, après lequel la constellation d’étoiles du PSG court depuis sa reprise par le Qatar, qui récompense l’architecte de l’équipe, Patrice Canayer.

Depuis vingt-trois ans, le nom de Canayer est indissociable de la cité héraultaise. « C’est le rouage essentiel du système Montpellier depuis plus de vingt ans », salue l’ancien international français Guillaume Gille. Et l’actuel entraîneur adjoint de l’équipe de France de relever qu’il est « de plus en plus rare de voir quelqu’un avoir autant de responsabilités dans un système aussi professionnel. » Car à Montpellier, l’ancien joueur de première division de handball fait tout. A la fois entraîneur et manageur général de l’équipe, le Nîmois de naissance a d’abord construit le club qui a dominé le handball français dans les années 2000 (14 titres de champions jusqu’en 2012). Puis, après le départ de nombreuses stars – à commencer par les frères Karabatic – sur fond de l’affaire des paris truqués, Patrice Canayer n’a pas quitté le navire, et, après avoir écopé tant et mieux, a ramené son club des bords du gouffre jusqu’au toit de l’Europe.

Il a fait de son club la référence en France

« Allez les gars, on va jusqu’au bout ! » Démonstratif lors de la finale face aux Nantais de son homologue Thierry Anti, qu’il croise sur le banc de touche depuis plus de deux décennies, Patrice Canayer a mené ses ouailles à un nouveau trophée européen. Eux qui quelques jours auparavant – mardi – avaient sans doute dit adieu à leur rêve d’être sacrés champions de France après une défaite sur le parquet de Saint-Raphaël, ont su se reprendre pour offrir un nouveau titre à leur entraîneur, porté en triomphe sur le podium.

« Montpellier, c’est une équipe référence, qui a fait l’histoire du handball français », souligne Guillaume Gille, saluant « le palmarès du club et les crises qu’il est parvenu à traverser, avant de se relever et redevenir performant. » Loin de se laisser abattre par la concurrence nouvelle du PSG ou les coups du sort, l’entraîneur montpellierain s’est retroussé les manches et a reconstruit une équipe, en s’appuyant sur le centre de formation. « Montpellier est un club chevronné et expérimenté, mais c’est une très jeune équipe de 24 ans de moyenne d’âge », soulignait Canayer avant le week-end dans un entretien à L’Equipe. En finale, le pivot Ludovic Fabregas, pur produit du club héraultais, a inscrit 6 buts, portant ses coéquipiers vers la victoire du haut de ses 21 ans.

Son club est également celui dont les autres équipes tentent de copier le modèle. « Montpellier a toujours été un exemple au niveau de l’équipe professionnelle, de la formation, et la structuration du club, saluait avant le Final Four l’ancien capitaine de l’équipe de France Jérôme Fernandez. Des clubs comme Saint-Raphaël [récent finaliste de la « petite » Coupe d’Europe, NDLR] et Nantes ont suivi cet exemple en progressant étape par étape. Et c’est le modèle pour les autres clubs, qui n’ont pas la chance de voir quelqu’un arriver avec d’énormes moyens, comme ça a été le cas à Paris. » Aujourd’hui entraîneur d’Aix-en-Provence, en première division, l’ancien international s’inspire au quotidien du club héraultais dont il admire « le collectif » mis en place par Patrice Canayer, un « fantastique leader ».

Technicien tout sauf dogmatique, le Nîmois de 57 ans adapte le jeu de son équipe en fonction des hommes à sa disposition. « Comme Thierry Anti, Patrice Canayer est un entraîneur qui a vu évoluer le handball français, a su tirer les enseignements et renouveler son effectif, abonde Didier Dinart, le sélectionneur de l’équipe de France. Il travaille avec des jeunes et fait avancer les choses dans le bon sens. » Et l’ancien « Roc » de la défense française de saluer « la régularité des résultats » de l’entraîneur montpellierain.

A la fin du match, alors que l’issue de la rencontre ne faisait plus de doute, l’ancien prof de sport, réputé pour sa poigne de fer, a laissé ruisseler ses larmes. Acclamé par la Kölnarena de Cologne alors qu’il embrassait le trophée européen, Patrice Canayer a, à 57 ans, mené par deux fois son « Petit Poucet » montpelliérain au sommet de l’Europe.