Le journaliste russe Arkadi Babtchenko est apparu lors d’une conférence de presse à Kiev, en Ukraine, mercredi 30 mai. / VALENTYN OGIRENKO / REUTERS

Coup de théâtre à Kiev. Près de vingt-quatre heures après l’annonce de sa mort, le journaliste russe Arkadi Babtchenko est apparu vivant, mercredi 30 mai, lors d’une conférence de presse à Kiev, là même où il était censé avoir été tué de trois balles dans le dos. Le procureur général ukrainien et les chefs des services de sécurité (SBU) ont fait savoir que cette annonce était l’un des éléments d’une opération spéciale destinée à tromper l’exécutant et le commanditaire du meurtre, qui avait été bel et bien planifié.

Le tueur, appréhendé, est un ressortissant ukrainien, ancien soldat, qui aurait été recruté par les services russes contre la somme de 40 000 dollars. « Nous devions faire croire aux représentants des services spéciaux russes que l’assassin avait rempli sa mission », a expliqué le député Anton Guerachtchenko, conseiller auprès du ministère de l’intérieur. Il n’était pas clair dans l’immédiat si le commanditaire a lui aussi été arrêté.

Vive émotion en Russie et en Ukraine

M. Babtchenko, 41 ans, a également pris la parole pour s’excuser auprès de sa femme et de ses enfants d’avoir dû garder le secret, faisant savoir qu’il avait appris l’existence d’un projet d’assassinat contre lui il y a un mois. L’annonce de la mort du journaliste et écrivain avait provoqué une vive émotion tant en Russie qu’en Ukraine, deux pays où il est une figure connue.

Arkadi Babtchenko avait combattu dans l’armée russe lors des deux guerres de Tchétchénie (1994-1996 et 1999-2000), avant de travailler comme reporter de guerre pour le journal Moskovsky Komsomolets ou la chaîne NTV. Il s’était ensuite rapproché de publications libérales, en particulier Novaïa Gazeta. M. Babtchenko avait aussi raconté dans plusieurs livres son expérience au sein des forces armées russes, recevant plusieurs prix littéraires.

Opposé à l’annexion de la Crimée, en 2014, et à la guerre menée par Moscou dans l’est de l’Ukraine, il s’était mué en critique virulent du régime de Vladimir Poutine. Il avait fui la Russie en février 2017 après avoir reçu des menaces de mort, consécutives à une violente campagne sur Internet et sur les télévisions russes. Depuis un an, il animait une émission sur la chaîne de télévision ukrainienne ATR, chaîne historique des Tatars de Crimée désormais installée à Kiev. Il continuait aussi de collaborer à plusieurs journaux et écrivait de façon indépendante sur les réseaux sociaux, notamment sur le conflit toujours en cours dans le Donbass.