Capture d’écran de la couverture de « Vogue Arabia ».

La dernière couverture du magazine Vogue, montrant une princesse saoudienne posant au volant d’une décapotable rouge, n’est pas passée inaperçue. On y voit la fille de l’ancien roi Abdallah portant gants en cuir et talons aiguilles, et vêtue d’une longue tenue blanche et d’un voile laissant apparaître une partie de sa chevelure.

Avec cette « une » de son numéro de juin, Vogue Arabia voulait célébrer les « femmes avant-gardistes en Arabie saoudite » et louer les réformes sociétales engagées par le prince héritier Mohammed Ben Salman. Riyad s’est notamment engagé en septembre 2017 à autoriser les femmes à conduire, fixant ensuite au 24 juin la levée de l’interdiction.

« Dans notre pays, certains conservateurs ont peur du changement. (…) Personnellement, je soutiens ces changements avec beaucoup d’enthousiasme », a affirmé la princesse Hayfa Bint Abdallah Al-Saoud au magazine.

Colère des militants des droits des femmes

La photo a déclenché la polémique dans le royaume conservateur. Les militants des droits de la femme ont fait part de leur colère, au moins onze des leurs ayant été arrêtés en mai, en majorité des femmes connues pour avoir lutté contre l’interdiction de conduire et le système de tutelle masculine en Arabie saoudite. Au moins quatre d’entre eux ont été libérés la semaine dernière, mais le sort des autres reste incertain, selon Amnesty International.

Des médias progouvernementaux saoudiens les ont qualifiés de « traîtres », tandis que sur les réseaux sociaux, la photo de la couverture a été largement reprise en remplaçant le visage de la princesse par celui des militantes détenues.

« Après que@VogueArabia a pensé qu’il faisait sens de présenter [la princesse] sur son numéro de juin 2018 consacré aux femmes avant-gardistes d’Arabie saoudite(…), les Saoudiennes se sont servies de Twitter pour s’y opposer, et ont remplacé sa photo par celles de trois des militantes arrêtées et qualifiées de traîtresses », a tweeté la militante saoudo-américaine Nora Abdulkarim.

Selon des analystes, la récente campagne de répression contre les militants des droits de la femme reflète les limites des réformes engagées par le prince héritier, qui a récemment fait une tournée internationale visant à redorer l’image du royaume ultraconservateur.