Le chef du gouvernement israélien a planté le décor dès le premier jour de sa tournée européenne, lundi 4 juin à Berlin, en mettant en garde Angela Merkel contre un nouvel afflux de réfugiés syriens si rien n’est fait pour contenir l’influence croissante de Téhéran au Moyen-Orient. Benyamin Nétanyahou va poursuivre, mardi 5 juin à Paris, son offensive pour tenter de créer un front commun contre l’Iran. A l’instar de la chancelière allemande, le président français Emmanuel Macron va réitérer la nécessité de sauvegarder l’accord sur le nucléaire iranien qui, à défaut d’être parfait, offre aux yeux des Européens le seul garde-fou contre la prolifération nucléaire dans la région.

Les deux dirigeants – qui se rencontrent pour la troisième fois à Paris depuis juillet 2017 – devraient constater une nouvelle fois leurs divergences sur les moyens de ramener la stabilité dans la région, tout en faisant la même analyse des menaces.

Le « diagnostic est partagé sur le fait que la présence militaire de l’Iran ou de groupes pro-iraniens en Syrie représente une menace durable », relève la présidence française. Mais Paris appelle à compléter l’accord existant en discutant avec l’Iran de ses activités balistiques et de son influence régionale, là où Israël est sur une approche beaucoup plus frontale pour forcer Téhéran à renégocier l’accord nucléaire.

« L’objectif de Benyamin Nétanyahou c’est de sortir du tête-à-tête avec Washington » et de « contraindre a minima les Européens à renforcer l’accord existant », si besoin en réintroduisant des sanctions contre l’Iran, estime Laurent Khalfa, chercheur associé à l’Institut prospective et sécurité en Europe (IPSE) à Paris. L’Etat hébreu mise pour cela sur deux leviers, la menace de sanctions américaines contre les entreprises européennes – qui ne sont pas encore entrées en vigueur – et l’axe entre les Etats-Unis, Israël et l’Arabie saoudite, dit-il.

Le conflit israélo-palestinien relégué au second plan

Face à l’urgence iranienne, le conflit israélo-palestinien se trouve relégué à l’arrière-plan, même si le président palestinien Mahmoud Abbas est attendu prochainement à Paris et si Emmanuel Macron doit se rendre en Israël et dans les Territoires palestiniens d’ici la fin de l’année.

En décembre 2017, le président français avait exhorté Benyamin Nétanyahou à faire des « gestes » envers les Palestiniens. La situation s’est encore envenimée après la mort d’au moins soixante et un Palestiniens, tués par des tirs israéliens lors de manifestations le 14 mai le long de la barrière séparant la bande de Gaza d’Israël.

Emmanuel Macron a condamné « les violences des forces armées israéliennes » tout en rappelant « son attachement à la sécurité d’Israël », une position jugée trop simpliste dans l’Etat hébreu et trop complaisante à gauche de l’échiquier politique en France.

Les associations pro-palestiennes ont appelé à manifester contre Benyamin Nétanyahou, qu’elles accusent de « crimes de guerre », dans toutes les grandes villes de France en fin d’après-midi. Trois syndicats français de journalistes ont aussi jugé « insupportable » qu’il soit reçu par le président Macron.

Des convergences pour la saison culturelle

Les deux dirigeants veulent de leur côté mettre à profit la saison culturelle croisée France-Israël qu’ils lanceront mardi soir, à l’occasion des 70 ans de l’Etat d’Israël, pour montrer ce qui rassemble les deux pays au travers de 400 événements.

« Macron a une approche extrêmement pragmatique, avec une volonté de découpler le sujet du conflit israélo-palestinien du volet de la coopération bilatérale », estime Laurent Khalfa en notant l’intérêt du président pour le modèle israélien de « start-up nation ».

Le président et le premier ministre inaugureront d’ailleurs une exposition retraçant les innovations technologiques israéliennes, israel@lights, au Grand Palais.

Le constructeur automobile PSA prépare son retrait d’Iran

Le constructeur automobile PSA devient le deuxième grand groupe français, après Total, à se plier aux injonctions américaines. Il a annoncé, lundi 4 juin, qu’il préparait son retrait d’Iran, son plus grand marché étranger en volume. PSA, dont les marques Peugeot et Citroën avaient formé des sociétés communes en Iran, a annoncé dans un communiqué avoir « commencé le processus de suspension des activités de ses JVs [joint-ventures], afin de se conformer à la loi américaine d’ici le 6 août 2018 ».

Pour cette entreprise, un retrait de ce pays, s’il se confirme, constituerait un revers majeur. Le groupe avait vendu l’an dernier 444 600 véhicules en Iran, où il est traditionnellement bien implanté. Il s’agissait l’an dernier de son premier marché étranger devant la Chine (382 800 unités), le Royaume-Uni (279 100), l’Italie (265 200) et l’Allemagne (257 800). Le deuxième constructeur européen relativise cependant l’importance du marché iranien en termes financiers. Les activités de PSA en Iran représentent « moins de 1 % de son chiffre d’affaires ».

PSA souligne aussi qu’il « est en contact avec les autorités américaines pour envisager une dérogation », « avec le support du gouvernement français », dans l’espoir de pouvoir poursuivre son activité.