L’avis du « Monde » – pourquoi pas

Certains ont beau dire grand mal des franchises hollywoodiennes, nul ne peut contester qu’elles exercent une action bienfaitrice sur les neurones dès lors qu’il s’agit de remettre en ordre ses souvenirs. Ainsi, dans la famille jurassique qui nous tétanise les tympans depuis vingt-cinq ans, Jurassic World : Fallen Kingdom (JW2) occupe la cinquième place. L’ont précédé deux épisodes réalisés par Steven Spielberg, Jurassik Park (1993) et Le Monde perdu (1997), adaptés des romans de Michael Crichton, un troisième volume signé John Johnston (2001), puis, plus éloigné de la trilogie initiale, Jurassic World (2015) de Colin Trevorrow.

Dotée d’un fort indice de contentement populaire, la saga peut se synthétiser comme suit : sur Isla Nublar, île fictive au large du Costa Rica, John Hammond, le PDG d’un groupe industriel, décide de créer un parc d’attractions préhistorique en redonnant vie par des manipulations scientifiques aux animaux d’époque. Comme il se doit, les sauriens, trop bornés pour prendre conscience de leur statut d’attraction, se comportent comme des gougnafiers et grèvent les profits que leurs propriétaires entendent tirer de leur résurrection. Vertu de pure façade, puisque, en vérité, c’est le contraire : plus les dinosaures saccagent les infrastructures commerciales et plus ils dévorent de capitalistes véreux et autres savants fous à leur solde, mieux les films se portent.

Les choses se gâtent dès que Spielberg se retire de la réalisation

Du moins la saga en ses débuts peut-elle se prévaloir, sous le couvert d’une réflexion philosophique (l’homme peut-il sans danger asservir la nature ?) déjà de circonstance à l’époque de King Kong (1933), d’un esprit carnassier mais bon enfant, de personnages un peu travaillés et d’avancées technologiques majeures dans les effets spéciaux. Les choses se gâtent dès que Spielberg se retire de la réalisation. L’enjeu se résume alors à ressasser l’intrigue originelle, en inventant un nouveau superprédateur pour chaque film, plus redoutable que cette bonne vieille carne de Tyrannosaurus rex. Ce fut le cas du Spinosaurus dans le troisième volume, puis de l’hybride génétique Indominus rex dans le quatrième.

Triple péril

Lorsque s’ouvre JW2, le parc d’attractions d’Isla Nublar est toujours fermé à la suite du désastre causé par l’Indominus rex. Une autre catastrophe pointe à l’horizon, avec l’entrée en activité d’un volcan qui menace d’exterminer la faune préhistorique locale. Les deux héros du 4 – l’ex-directrice du parc Claire Dearing (Bryce Dallas Howard) et le dresseur de vélociraptors Owen Grady (Chris Pratt) – sont missionnés par le milliardaire anglais Lockwood, ex-collaborateur de John Hammond, pour sauver les spécimens rares et les ramener sur le continent.

Le couple devra y affronter le triple péril des paramilitaires censés les protéger, de l’éruption volcanique et des monstres locaux. De sorte que la première moitié du film se présente comme un pur « survival ». Sur le continent, Gills, conseiller de Lockwood et âme damnée de ce film, travaille avec le docteur Wu à l’élaboration du nouveau monstre, mélange d’Indominus et de vélociraptor et arme fatale, baptisé… Indoraptor. Lequel se tient prêt à accueillir nos héros pour une partie de cache-tampon dans le château de Lockwood. L’Espagnol Juan Antonio Bayona (L’Orphelinat) signe cet opus qui remplit à satiété son office spectaculaire, sans y laisser hélas le moindre gage d’esprit.

Jurassic World : Fallen Kingdom / Bande-Annonce Finale VF [Au cinéma le 6 juin]
Durée : 02:35

Film américain de Juan Antonio Bayona. Avec Chris Pratt, Bryce Dallas Howard, Jeff Goldblum (2 h 09). Sur le Web : www.jurassicworld-lefilm.com et www.universalpictures.com/movies/jurassic-world-fallen-kingdom