Le président nigérian Muhammadu Buhari, à New York, en septembre 2017. / Shannon Stapleton / REUTERS

Les parlementaires nigérians ont menacé, mercredi 6 juin, le président Muhammadu Buhari de recourir à une procédure de destitution si des mesures fortes ne sont pas prises pour endiguer la corruption et rétablir la sécurité dans le pays, révélant des désaccords de plus en plus profonds avec l’exécutif. Les deux chambres du Parlement ont affirmé dans une résolution que l’Assemblée nationale « n’hésitera pas à [recourir à] ses pouvoirs constitutionnels si rien n’est fait », après une « session conjointe » tenue à huis clos à Abuja.

La présidence n’a pas commenté dans l’immédiat la résolution publiée par le service de communication du président du Sénat, Bukola Saraki, membre du All Progressive Congress (APC), au pouvoir.

Toutefois, le groupe parlementaire APC a dénoncé mercredi dans un communiqué la résolution adoptée « sans vote », à l’issue d’une réunion à laquelle ont pris part « presque exclusivement » des parlementaires de l’opposition. M. Buhari, élu en 2015 sur la promesse de vaincre l’insurrection du groupe djihadiste Boko Haram et de lutter contre la corruption, voit son bilan très critiqué, alors qu’il espère se faire réélire à la présidentielle prévue en 2019.

Incapacité à protéger les vies et les biens privés

Les combattants djihadistes, bien qu’affaiblis, continuent à mener des attaques sanglantes dans le nord-est, tandis que de violents affrontements entre agriculteurs et éleveurs pour l’accès à la terre secouent les Etats du centre depuis le début de l’année. Dans le nord du pays, des gangs multiplient enlèvements et vols de bétail à grande échelle.

La résolution réclame notamment le limogeage des principaux responsables de la sécurité pour leur incapacité à protéger les vies et les biens privés. Le chef de la police fédérale, Ibrahim Idris, est ainsi accusé de « ne rien faire » pour empêcher les violences.

L’APC est majoritaire au sein des deux chambres du Parlement, mais l’action du gouvernement est de plus en plus critiquée jusque dans les rangs de son propre parti, déchiré par les dissensions internes.

Les médias nigérians font régulièrement état de la rivalité opposant M. Buhari et le président du Sénat, ancien cadre du People’s Democratic Party (PDP, au pouvoir de 1999 à 2015) passé à l’APC lors des dernières élections, à qui beaucoup prêtent des ambitions présidentielles.

Bukola Saraki a été convoqué dimanche par la police pour être interrogé sur son rôle présumé dans des braquages de banques ayant fait plus de 30 morts en avril, les principaux suspects arrêtés l’ayant désigné comme commanditaire.