L’ancien vice-président congolais Jean-Pierre Bemba lors de son procès à la Cour pénale internationale de La Haye (Pays-Bas) le 2 décembre 2009. / ED OUDENAARDEN/AFP

Dix ans après son arrestation, Jean-Pierre Bemba devrait être définitivement fixé sur son sort devant la Cour pénale internationale (CPI), vendredi 8 juin. En 2016, l’ancien vice-président de la République démocratique du Congo (RDC) et ex-candidat à l’élection de 2006 avait été reconnu coupable par la justice internationale de « crimes contre l’humanité » et de « crimes de guerre », commis non pas dans son pays mais en République centrafricaine, en 2002 et 2003. Le « chairman », comme l’appellent ses partisans, avait été condamné à dix-huit ans de prison. Ses défenseurs avaient fait appel, comme le procureur, qui réclamait une peine d’au moins vingt-cinq ans. La décision des juges est attendue dans l’après-midi à La Haye.

Jean-Pierre Bemba, qui n’était pas en République centrafricaine au moment des faits, avait été condamné en tant que supérieur hiérarchique n’ayant ni prévenu, ni puni les crimes de sa milice, le Mouvement pour la libération du Congo (MLC), devenue depuis un parti politique en RDC. Durant cinq mois en 2002 et 2003, quelque 1 500 soldats du MLC avaient tué, pillé et ravagé. De nombreuses victimes avaient déposé lors du procès en première instance, évoquant notamment des viols, le plus souvent collectifs et en public.

Arrêté en Belgique en mai 2008

Au cours des audiences d’appel, en janvier, comme tout au long du procès, Jean-Pierre Bemba avait, une fois de plus, éludé ses responsabilités et nié tout contrôle de ses hommes présents en République centrafricaine. A l’époque des crimes, les miliciens du MLC étaient partis combattre au profit du président centrafricain Ange-Félix Patassé, en butte à la rébellion de son futur tombeur, François Bozizé. Les avocats de M. Bemba assurent qu’une fois passée l’Oubangui, qui marque la frontière entre les deux pays, les combattants du MLC avaient été placés sous l’autorité de l’armée régulière centrafricaine. Ange-Félix Patassé avait, un temps, été ciblé par le bureau du procureur de la CPI, avant que ce dernier décide de ne pas le poursuivre.

Jean-Pierre Bemba avait été arrêté en Belgique en mai 2008, à la demande de la CPI. L’homme d’affaires y vivait en exil depuis sa fuite de Kinshasa, en 2007.

Vendredi à 16 heures (heure locale de La Haye), l’une des principales personnalités politiques jugées devant le tribunal international saura donc si les juges confirment sa culpabilité et décident, ou non, d’alourdir sa peine, comme le demande le procureur. Ils peuvent aussi ordonner la reprise du procès sur l’un ou l’autre des chefs d’accusation, ou décider d’acquitter Jean-Pierre Bemba de toutes les charges.

Si cette dernière hypothèse se confirmait, il pourrait recouvrer la liberté. « Il serait assez choquant que Jean-Pierre Bemba puisse sortir de prison avant même que des formes de réparations soient définies pour les victimes », estimait sur RFI, mercredi, Karine Bonneau, de la Fédération internationale des ligues des droits de l’homme (FIDH). L’organisation avait porté le dossier des crimes commis en Centrafrique à la CPI, espérant que les protagonistes seraient poursuivis, mais regrette aujourd’hui de ne voir que Jean-Pierre Bemba comparaître à La Haye. Dans ce procès, 5 229 victimes ont été représentées par des avocats et espèrent des réparations.

Quant aux partisans du « chairman », ceux-ci espèrent déjà qu’il pourra concourir pour la présidentielle en RDC, prévue le 23 décembre. Outre sa condamnation dans les crimes commis en Centrafrique, l’ancien vice-président congolais a aussi été condamné en 2017 à un an de prison pour subornation de témoins au cours de son procès et à 300 000 euros d’amende, qui doivent être versés au fonds de la CPI destiné aux victimes.