Rafael Nadal a remporté son 17e titre de Grand Chelem, dimanche à Roland-Garros. / OLIVIER MORIN / AFP

Comment trouver des mots neufs quand tout a déjà été dit, redit, écrit et réécrit ? « Undécuple ». Voilà un mot qui est introuvable dans le dictionnaire. Rafael Nadal vient de remporter son onzième titre à Roland-Garros – son 17e titre de Grand Chelem – et c’est comme ça qu’il faudra désormais qualifier le roi. Dimanche, il n’a fait qu’une bouchée de son unique bourreau de la saison, Dominic Thiem (6-4, 6-3, 6-2).

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Le premier point du match est à peine joué que les supporteurs de l’Autrichien tremblent déjà : « Allez Dominic, lâche-toi, tu vas gagner ! », vocifère l’un d’eux. Car contrairement à tous ses matchs depuis le début de la quinzaine, Rafael Nadal ne loupe pas son entrée. Il se montre solide au service et colle tout de suite la pression à Thiem (8e mondial), qui concède sa première mise en jeu. Mais celui-ci revient immédiatement au score, prenant son adversaire à contre-pied. Précis et surpuissant en coup droit, il contraint Nadal à raccourcir les siens. A 3-2, l’Autrichien a à nouveau les pires difficultés à servir et sauve deux balles de 4-2. Seulement six jeux disputés et déjà quarante minutes d’écoulées...

Explosion en revers

Sous les yeux de Zinédine Zidane, déjà présent lors du premier sacre en 2005, les deux joueurs se rendent coup pour coup sans afficher un niveau de jeu exceptionnel. Mais quand on entre dans le « money time », c’est le moment que choisit invariablement Rafael Nadal pour serrer le jeu et asphyxier sa proie. Dominic Thiem n’y échappe pas. Son bourreau se procure trois balles de break synonymes de balles de set et après une nouvelle faute en coup droit de Thiem et une heure de jeu, enlève la première manche 6-4.

Nadal assomme son dauphin de coups puissants liftés du fond du court, qui, inexorablement acculé, finit par commettre la faute. L’Autrichien cumule les doubles fautes et s’effondre d’entrée de deuxième set, explose en revers et force sur tous les coups. En maître tacticien de la terre battue, lui, Nadal exécute son jeu d’échecs : il place des accélérations en revers croisé, se décale parfaitement en coup droit et se détache 3-0, puis 4-1. Il n’y a plus qu’un joueur sur le terrain.

Spectateur de son propre match, Dominic Thiem a regardé passer les coups droits décroisés. / Michel Euler / AP

« J’ai un plan pour battre Nadal », avait répété Dominic Thiem à la veille de la finale, le seul à avoir battu le numéro un mondial deux fois en un an (Rome 2017, Madrid 2018) mais jamais en trois sets gagnants. Malgré ses coups profonds et sa puissance en fond de court, rien ne fonctionne comme sur le papier. C’est bien l’Espagnol qui domine l’échange et dicte le jeu. Sur le court Philippe-Chatrier, le soleil fait sa première percée du jour et le coup droit lifté de Nadal, lui, n’en finit plus de gicler. Saoulé de coups et saoulé tout court, Thiem baisse les yeux. Nadal, lui, lève le poing. Inéluctablement, le deuxième set lui échoit (6-3).

Frayeur physique pour Nadal

Dos au mur, le 8e mondial écarte quatre balles de break d’entrée de troisième set et réussit à glaner sa mise en jeu sur un puissant revers décroisé. Mais c’est pour mieux s’effondrer sur sa mise en jeu suivante. Spectateur de son propre match, Dominic Thiem regarde passer les coups droits décroisés. Main sur la hanche, il se retourne désespérement vers son clan.

La finale manque cruellement de suspense, alors l’Espagnol va jusqu’à en inventer. A 2-1, alors qu’il mène tranquillement sur son service, il ressent une douleur à l’avant-bras gauche et se fait masser à deux reprises. Mais la frayeur dans le clan espagnol n’est que de courte durée. Le numéro un mondial remporte sa mise en jeu et s’empare dans la foulée une dernière fois de celle de son adversaire. Le dénouement est implacable : sur un ultime jeu blanc, l’Espagnol se procure trois balles de match. Les trois premières occasions sont manquées. La quatrième aussi. Mais pas la cinquième. Sur un ultime retour trop long de Thiem, le voilà qui s’impose 6-2. L’Espagnol peut lever les bras au ciel.

« Passation de pouvoir ? », titrait dimanche Le quotidien de Roland-Garros. Rafael Nadal, lui, a décidé que la fin de son règne n’était pas encore arrivée.