Série sur Canal+ à la demande

The Young Pope - Bande annonce longue CANAL+ [HD]
Durée : 01:28

Toujours disponible sur Canal+ à la demande, The Young Pope (2016) ne décevra pas les aficionados de Paolo Sorrentino, dont les films ultrasophistiqués et lunaires –notamment La Grande Bellezza (2013) et Youth (2015) – sont adorés ou détestés. Car ils ont, fortement ancré, ce qu’on appelle un style.

La série créée et réalisée par l’Italien pour Canal+ et HBO est aussi marquée par un onirisme volontiers excentrique dont l’irréalité fait pourtant bon ménage avec le réel. Tournée en décors naturels et reconstitués – car le Vatican n’a pas laissé pénétrer en ses murs une production aussi hérétique –, The Young Pope est dotée d’une réalisation qui joue magnifiquement avec les espaces.

Le bureau du pape, dont la vastité est intimidante, avec son globe terrestre sur lequel se décident d’un coup de doigt girateur les affectations des cardinaux récalcitrants ; les jardins, qui rappellent ceux des peintres italiens anciens ; les grands espaces urbains vides à la manière des toiles de Giorgio De Chirico.

Lenny Belardo, jeune et très beau pape nouvellement élu (joué diaboliquement bien par Jude Law), décide de faire de l’Eglise catholique un lieu de mystère, d’austérité, de rigueur morale sans récents précédents : chasse aux prêtres homosexuels, menaces et chantages, purges en tout genre et arrivée, en conseillère spéciale, d’une nonne incarnée par l’inattendue mais étonnante Diane Keaton.

Jude Law incarne le pape Lenny Belardo dans « The Young Pope ». / CANAL+

De surcroît, le jeune pape refuse de se montrer – jusqu’à ce qu’il décide de paraître, au cours d’une scène finale stupéfiante, qui se développe en parallèle du magnifique mouvement lent d’une pièce orchestrale de John Adams, Naive and Sentimental Music (1999).

Une atmosphère surnaturelle

Ce choix du réalisateur, dont l’oreille musicale est très fine, produit une atmosphère surnaturelle. Le fait d’utiliser presque entièrement ce mouvement, qu’on entend fugitivement dans d’autres épisodes, laisserait presque accroire que Sorrentino a conçu cet étonnant final pour magnifier la musique et non l’inverse.

La musique de John Adams – le compositeur nord-américain contemporain le plus joué aujourd’hui – constituait aussi la trame sonore du film Amore (2009), de Luca Guadagnino. Le compatriote de Sorrentino a recomposé une bande sonore à ­partir de pièces d’Adams, notamment, au moment de la grande scène d’amour, la composition pourseptuor à cordes Shaker Loops (1978). L’effet est magique.

Arvo Pärt est un autre compositeur d’élection de Sorrentino, et l’on retrouve, dans le dernier épisode de The Young Pope, un extrait de sa Symphonie no 3 (1971).Le pot-pourri de chansons, de musique classique et contemporaine, constitue un subtil patchwork de « microclimats » sonores.

Cette situation tranche avec l’ordinaire de la musique qui accompagne les séries. A l’exception de celles de Mac Quayle, le musicien de Ryan Murphy, et de David Buckley, dont la musique pour The Good Fight, inspirée de l’Orfeo de Claudio Monteverdi, est d’une rare inventivité.

Une deuxième saison de The Young Pope avait été envisagée. Paolo Sorrentino, privé de son acteur principal (Jude Law réapparaîtrait peut-être mais de manière secondaire), aurait choisi de renouveler le propos avec une série dérivée nommée The New Pope, qui devrait être tournée à la fin de cette année avec une distribution entièrement remodelée.

The Young Pope. Série écrite et réalisée par Paolo Sorrentino. Avec Jude Law, Diane Keaton, Silvio Orlando (Italie, 2016, 10 × 52 min). Sur MyCanal.