Œil pour œil, dent pour dent : aussitôt connues les mesures de Washington, la Chine a appelé les autres pays à engager une « action collective » contre les taxes américaines et annoncé qu’elle appliquerait des droits de douane pour un montant équivalent à ceux des Etats-Unis. C’est-à-dire sur 50 milliards de dollars (43 milliards d’euros) d’importations de produits américains.

Cette réaction n’est pas une surprise, les deux premières puissances économiques du monde échangeant depuis bientôt trois mois des menaces de sanctions. Fin mars, le ministère du commerce chinois prévenait : « La Chine ne veut pas d’une guerre commerciale. Mais la Chine n’a en aucun cas peur d’une telle guerre. »

L’Amérique pro-Trump visée

Pékin va appliquer des droits de douanes de 25 % sur une liste de produits américains agricoles (soja, produits de la mer, porc, mais aussi whisky et cigares) et industriels (véhicules électriques). Comme les Etats-Unis, la Chine appliquera ses taxes sur une première liste de produits représentant 34 milliards de dollars d’importations, tout en préparant une autre liste pesant 16 milliards de dollars, avec notamment les hydrocarbures.

En visant des produits agricoles comme le soja, la Chine s’attaque au cœur de l’Amérique pro-Trump. Elle choisit aussi des biens facilement remplaçables auprès d’autres pays exportateurs. Vitaux pour l’industrie électronique chinoise, les semi-conducteurs (puces électroniques), premier secteur d’importation en provenance des Etats-Unis, ne sont pas concernés.

Le ministère chinois du commerce a précisé que la décision américaine mettait fin aux engagements de Pékin de réduire son excédent commercial avec les Etats-Unis. La Chine avait accepté d’acheter plus de produits agricoles américains, pour rééquilibrer un peu la balance commerciale entre les deux pays, très déficitaire pour les Etats-Unis. Entre-temps, Washington avait joué la surenchère, menaçant de taxer jusqu’à 150 milliards de dollars de produits chinois.

Prise de conscience

Pékin a cherché l’apaisement, concédant des mesures en faveur des entreprises étrangères, comme la baisse des droits de douane sur les véhicules importés, une mesure bénéficiant surtout au secteur du luxe, la plupart des constructeurs produisant déjà en Chine pour échapper à ces taxes. Et le 10 avril, le président Xi Jinping avait annoncé la fin de l’obligation pour les constructeurs étrangers de s’associer avec une entreprise locale pour produire des voitures en Chine.

La guerre commerciale risque d’avoir l’effet inverse de celui recherché par Washington. En Chine, les tensions commerciales, et l’affaire ZTE, en particulier, qui a vu l’équipementier télécoms suspendre son activité faute de pouvoir importer des composants américains, avant qu’un accord ne soit trouvé, ont provoqué une prise de conscience. Officiels et patrons du privé ont débattu des faiblesses de l’industrie chinoise, et annoncé des investissements, dans les semi-conducteurs notamment, pour avancer dans les secteurs de pointe.