Pour la seconde année consécutive, le festival Download réinvestit l’ancienne base aérienne 217 de Brétigny-sur-Orge - Le Plessis-Pâté, en Essonne. L’an dernier, 120 000 fans de rock s’étaient déplacés dans ce cadre exceptionnel cerné de vieilles carlingues d’avion, au sud de la capitale. Cette édition 2018 espère renouveler cette audience en s’étendant sur quatre jours, du vendredi 15 au lundi 18 juin, contre trois précédemment. Raison de ce débordement sur la semaine suivante, la venue des mythiques hard-rockers de Guns N’ Roses, qui ont rempli l’été dernier le stade de France.

Déclinaison française d’un festival créé en 2003 en Angleterre (et qui existe aussi à Madrid en Espagne), le Download Paris fut perçu lors de sa première édition en 2016 comme la réponse du géant promoteur Live Nation au fameux Hellfest, événement référence de metal qui se déroule à une semaine d’écart à Clisson (Loire-Atlantique). « Le Hellfest fait très bien dans le rock extrême, mais on savait qu’il y avait aussi une place pour un festival rock au sens large, car beaucoup de groupes jouent sur Paris durant cette période en juin-juillet, justifie Damien Clamart-Boudet, responsable de la programmation du Download. Nous sommes en fait complémentaires du Hellfest. Cette année, 40 % de la programmation ne sera visible qu’au Download. » Cinq scènes accueillent au total 77 artistes, dont 33 en exclusivité (Ozzy Osbourne, Foo Fighters, The Hives…). Parmi cette offre, 22 groupes français dont Mass Hysteria pour leur unique concert de l’année, l’electro-rock de Perturbator et le metal-indus de Treponem Pal.

Bernard Monasterolo

Retenir les leçons des erreurs passées

Si les festivals rock et metal sont en plein essor, les têtes d’affiche, elles, peinent à se renouveler. Des stars telles qu’Ozzy Osbourne, Aerosmith ou Scorpions, présents dans le paysage depuis parfois près de cinquante ans, ont du mal à céder leur place, en dépit de tournées d’adieux interminables. Damien Clamart-Boudet se veut plus optimiste :

« Je ne suis absolument pas inquiet, des groupes comme Ghost, Parkway Drive ou Avatar pourraient être les têtes d’affiche du futur. Mais cette jeune génération n’osera pas jouer à la place d’Ozzy Osbourne ou Judas Priest, qui sont des mythes vivants. Il existe dans le rock un respect immuable aux anciens. »

Depuis sa première édition sur la pelouse de Longchamp, l’organisation a retenu les leçons des erreurs passées pour pallier les grèves de transport ou les aléas météorologiques ; les conditions d’accès à la base aérienne ont été améliorées, les parkings agrandis, de l’herbe a été plantée sur le site et des espaces ombragés ont été installés sur près de 300 m2. L’accent a notamment été mis sur le camping, véritable lieu de vie parallèle pouvant accueillir jusqu’à 15 000 places. Une scène y accueille des groupes après 23 heures, et en fin de matinée avant l’ouverture du site.

Notre coup de cœur de la première journée, les Franciliens d’Hangman’s Chair, se produisent d’ailleurs sur cette scène peu avant minuit. Avec leur cinquième album Banlieue triste paru au printemps sur le label indépendant parisien Music Fear Satan, le quatuor a trouvé sa voie : des guitares sombres et pesantes à la lisière du grunge, contrebalancé par un chant clair habité. Banlieue triste pioche dans des références inattendues telles que Renaud et Daniel Balavoine.

« On a tous grandi dans le 91, à l’exception du chanteur qui est parisien, racontent Julien Chanut (guitare) et Mehdi Thepegnier (batterie), membres fondateurs du groupe, que nous avons rencontrés dans les loges. Ce titre représente notre enfance en France, et c’est bien sûr un clin d’œil à l’album Banlieue Rouge de Renaud. Comme tout le monde, on a été bercés par la chanson française qu’écoutaient nos parents, des gens comme Eddy Mitchell. » Le groupe vient de signer sur un label d’envergure internationale, Spinefarm Records (Ghost, Rammstein…), et sortira l’album partout dans le monde le 7 septembre. Une récompense méritée après dix années d’existence.

Hangman’s chair au Download Festival - Juin 2018 / Bernard Monasterolo

La messe rock grandiloquente de Ghost et Ozzy

Tout le contraire de Ghost, qui joue avec irrévérence avec les codes bibliques. Le terrifiant Cardinal Copia, nouvelle réincarnation de son leadeur Tobias Forge, et ses sept musiciens cachés sous un masque argenté, en costume noir et veste en queue de pie, sont devenus en quelques années les nouvelles coqueluches du rock lourd. Leur sens de la théâtralité et du politiquement incorrect (décorum médiéval et vitraux en forme de champignons…) est hérité d’Alice Cooper et de Slipknot, le tout enrobé d’une bonne dose de mélodies aguicheuses. Le fantôme scandinave interprète une grande partie de son tout nouvel album Prequelle, qui mise moins sur les gros riffs et verse davantage dans une pop grandiloquente.

Ghost au Download Festival - Juin 2018 / Bernard Monasterolo

Au crépuscule, le prince des ténèbres Ozzy Osbourne fait son entrée au son de Carmina Burana, une croix imposante surplombant la scène. Deux ans après les adieux de Black Sabbath au Hellfest, le chanteur britannique fait à son tour ses adieux en solo, avec le No More Tours II, à la suite de sa première tournée pré-retraite qui remonte à… 1992. C’est dire si l’on prend au sérieux l’annonce de cette mise en retraite. Mais le retour du guitar hero viking Zack Wilde, fidèle de 30 ans, a de quoi réjouir les fidèles du prince des ténèbres. La rock star presque septuagénaire possède en solo une liste conséquente de classiques (Crazy Train, Bark At The Moon, No More Tears), ce qui ne l’empêche pas de piocher allègrement dans le répertoire du Sabbath noir avec un Fairies Wear Boots et un War Pigs dantesques. Comme à son habitude, statique mais le regard de dément, le vétéran souvent raillé pour ses limites vocales s’en sort pourtant ce soir avec les honneurs. La cérémonie d’adieux se clôt sur l’hymne Paranoid, sans fausses notes.

Ozzy Osbourne au Download Festival - Juin 2018 / Bernard Monasterolo

Festival Download sur la base aérienne 217 de Brétigny-sur-Orge - Le Plessis-Pâté, située à trente minutes de Paris. Marilyn Manson en concert samedi 16 juin, les Foo Fighters dimanche 17 juin et Guns N’ Roses lundi 18 juin.

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