Son avenir lui est apparu pendant une Coupe du monde. C’était en 1978 alors qu’il n’avait que 7 ans. En voyant à la télévision la victoire de son pays, la Tunisie, sur le Mexique (3-1) lors du Mondial en Argentine, Nourredine Maamria s’est juré de devenir footballeur. Aujourd’hui entraîneur de Stevenage FC, en League Two anglaise, après avoir marqué des buts sur tous les terrains anglais, il a réalisé son rêve.

A l’heure où la Tunisie et l’Angleterre s’affrontent, lundi 18 juin, au premier tour du Mondial, il sait mieux que personne que rien n’est jamais écrit d’avance. « Il y a eu des moments très pénibles dans ma vie, raconte-t-il. C’est de là que vient ma résilience. Chaque difficulté affrontée m’a aidé à devenir le joueur que j’étais et l’entraîneur que je suis. » Le Tunisien est devenu en mars 2018 le premier coach africain du football professionnel anglais.

Benjamin d’une fratrie de sept enfants

Nourredine Maamria a vu le jour à Gafsa au sud de la Tunisie. « A l’époque, tous les clubs étaient au nord ou sur la côte, nous n’avions pas de terrain, pas d’équipement, se souvient-il. Quand je disais aux gens que je voulais devenir footballeur, ils se marraient. » Nourredine Maamria est le benjamin d’une fratrie de sept enfants. « J’ai grandi dans une famille pauvre où on n’avait pas grand-chose et jusqu’à l’âge de 4 ans j’ai vécu sous une tente, dit-il. Mais nos parents nous ont donné un cadre, une éducation. » Lors d’un match de rue, il est repéré par un recruteur de l’AS Marsa, un club de la banlieue de Tunis. Le jeune Maamria rejoindra l’équipe seulement quatre ans plus tard, le temps qu’il obtienne son bac comme le souhaitait son père.

L’attaquant arrive à La Marsa et tente de se faire une place dans l’équipe. « En tant que gars du Sud, j’ai subi quelques discriminations, se souvient-il. J’avais un accent dont les gens se moquaient, mais j’ai fait face. » Vingt-huit matchs et neuf buts plus tard, Nourredine Maamria s’impose dans le club avec lequel il remporte la Coupe de Tunisie en 1994. Lors d’un match de championnat face à l’Etoile du Sahel, il se fait remarquer par un scout du club de Burnley et, après un essai de deux semaines, il s’engage avec le club du nord de l’Angleterre.

« Un joueur mort de faim »

Blessé à la jambe dès son arrivée dans le Lancashire, il est écarté des terrains pendant dix-huit mois. Le Tunisien n’évoluera jamais avec les Clarets. Il rebondit à Doncaster où il s’adapte au « kick and rush » (« Tape dans le ballon et cours derrière »), schéma de jeu classique des équipes anglaises. « Le style était très différent de ce que j’avais connu en Tunisie car on ne touche pas autant le ballon, analyse t-il. Le style était très direct, avec beaucoup de contacts et de duels. » Chez les Rovers, Nourredine devient « Dino ». « Les fans m’ont tout de suite adopté et surnommé ainsi pour la détermination que je montrais sur le terrain, explique-t-il. Je jouais de la manière dont ils voulaient : un joueur mort de faim qui ne lâche rien. »

Il dispute 278 matchs et marque à 85 reprises. Lorsque vient l’heure de la retraite, il devient entraîneur après avoir passé ses diplômes à tout juste 25 ans. En octobre 2017, il est nommé, à 46 ans, à la tête de Nuneaton Town FC (en 6e division), avant de prendre, en mars, les rênes de son ancien club, le Stevenage FC dans lequel il a évolué de 2003 à 2006. Dino Maamria devient alors le premier coach africain du football professionnel anglais. Ce qu’il veut surtout prouver aujourd’hui, ce sont ses compétences en tant qu’entraîneur. Il sait que cela passera par des résultats : « Je veux faire monter le club en division supérieure dès la saison prochaine. »

En attendant, il regardera le match de ce soir entre « ses deux pays » avec un pincement au cœur : « Je ne veux pas choisir une équipe. En fait, peu m’importe le résultat… Mais si je pouvais faire un vœu, ça serait que la Tunisie sorte de ce groupe et que l’Angleterre gagne la Coupe du monde ! »