Angela Merkel le 20 juin 2018. / HANNIBAL HANSCHKE / REUTERS

L’accord sur la mise en place d’un budget de la zone euro, annoncé mardi par Emmanuel Macron et Angela Merkel, a provoqué, mercredi 20 juin, de vives tensions entre la chancelière allemande et l’aile droite de sa coalition gouvernementale.

L’Union chrétienne-sociale (CSU), petit parti bavarois très conservateur, désapprouve le projet d’un budget de la zone euro. Il souhaite convoquer une grande réunion de la coalition gouvernementale, avec le parti démocrate-chrétien (CDU) d’Angela Merkel et les sociaux-démocrates, pour clarifier la position sur le sujet.

La CSU vent debout contre le principe d’un budget de la zone euro

Pour Marcus Söder, un des dirigeants de la CSU, le projet de budget d’investissement de la zone euro, cher au président français Emmanuel Macron et auquel Angela Merkel a fini par donner un accord prudent mardi, s’apparente à un nouveau « budget caché » conçu au détriment des contribuables allemands et propre « à affaiblir l’euro ».

Pourtant, Angela Merkel l’a largement vidé de sa substance. Après avoir écarté le projet d’un ministre des finances et d’un Parlement pour la zone euro, elle a fait savoir que le montant du budget, qui n’a pas été précisé mardi, lors d’un sommet franco-allemand, se chiffrerait tout au plus à quelques dizaines de milliards quand, de son côté, le président français avait évoqué des centaines de milliards.

La chancelière doit composer avec une opinion publique très réservée sur la proposition, craignant de devoir finalement payer pour des Etats, dont elle juge la politique trop laxiste, comme l’Italie ou l’Espagne.

« Pour nous, cela s’apparente plus à une division de l’Europe, parce que les pays qui n’utilisent pas l’euro seront exclus. Je suis stupéfait de la promesse qui a été faite à Macron », a commenté Hans Michelbach, numéro deux du groupe parlementaire de la CSU.

Marcus Söder a également accusé Angela Merkel, restée longtemps sceptique à l’égard de la proposition française, d’avoir cédé en échange du soutien de Paris pour trouver un compromis européen à la maîtrise des flux migratoires. « Nous ne devons pas essayer d’obtenir des solutions [sur les migrants] en versant des subsides allemands », a-t-il souligné.

La CSU réclame un durcissement de la politique migratoire

Le nouveau front politique ouvert par son aile la plus à droite intervient à un moment où Mme Merkel est politiquement affaiblie après presque treize années au pouvoir, dans le sillage des législatives en septembre, marquées par la percée de l’extrême droite.

Horst Seehofer lui a donné deux semaines, soit jusqu’au sommet de l’UE des 28-29 juin, pour trouver une solution européenne au défi migratoire, faute de quoi il s’est dit prêt à « refouler immédiatement » les migrants arrivant aux frontières allemandes en provenance d’autres pays européens.

Une telle décision de sa part, sans l’aval de la chancelière, conduirait à son limogeage et à la chute du gouvernement actuel.

La CSU milite pour un net durcissement de la politique migratoire alors que se profilent des élections régionales en Bavière cet automne et que le parti est menacé sur ses terres par le parti d’extrême droite AfD.

La chancelière prône, de son côté, une solution européenne et a reçu le soutien mardi du chef de l’Etat français dans ce domaine. Les deux dirigeants ont dit travailler à un accord entre plusieurs pays de l’espace Schengen visant à refouler tout demandeur d’asile vers l’Etat, où il a été enregistré en premier. Ce que demande la CSU.

Mais, signe manifeste des relations glaciales entre la chancelière et la CSU : le ministre de l’intérieur Horst Seehofer, président du parti bavarois, a écourté sa présence à une cérémonie mercredi à l’occasion de la journée allemande des réfugiés, à laquelle participe Angela Merkel.