Le cardinal Theodore McCarrick au Vatican, en mars 2013. / Max Rossi / REUTERS

Nouveau scandale à ébranler la hiérarchie de l’église catholique américaine : le cardinal Theodore McCarrick, 87 ans, a été accusé d’abus sexuels et interdit mercredi 20 juin d’exercer son ministère.

Prêtre depuis 60 ans, l’homme qui fut promu évêque et archevêque dans l’archidiocèse de New York avant de partir pour Washington en 2001, est un des religieux américains les plus en vue à l’international. Bien qu’officiellement retraité, il continuait à voyager, notamment pour défendre des questions de droits de l’homme.

Les accusations d’abus sur un adolescent remontent à des décennies, mais ont été signalées au cardinal McCarrick il y a « quelques mois » seulement. Elles ont été rendues publiques pour la première fois mercredi, en même temps que sa suspension par le Vatican.

Accusations « crédibles et étayées »

Le cardinal Timothy Dolan, de l’archidiocèse de New York, a expliqué que son diocèse avait reçu des allégations sur des violences remontant à « plus de 45 ans », et qu’il avait appliqué « soigneusement » la Charte sur la protection des enfants et des jeunes, adoptée en 2002 par les évêques américains après le scandale de pédophilie qui a secoué le diocèse de Boston.

C’est ainsi qu’« une agence indépendante » a été chargée de mener « une enquête exhaustive », dont les résultats ont été transmis à une commission qui a jugé les accusations « crédibles et étayées », a souligné Mgr Dolan. Le Vatican, alerté, a demandé au cardinal McCarrick de « ne plus exercer publiquement son ministère », a-t-il ajouté. Theodore McCarrick, « tout en maintenant son innocence, accepte cette décision ».

L’archidiocèse de Washington a lui aussi publié un communiqué confirmant ces informations. Il a néanmoins précisé que McCarrick était interdit d’exercer son ministère dans l’attente d’« une décision définitive », sans dire quand elle pourrait intervenir. Aucun des deux archidiocèses n’a donné de détail sur la plainte à l’origine de cette suspension.

« Je crois en mon innocence »

Theodore McCarrick a simplement précisé que son accusateur était un adolescent à l’époque, tout en se disant « choqué » par ces accusations. « Ma tristesse a augmenté quand j’ai été informé que les allégations avaient été jugées crédibles et étayées. »

« Même si je n’ai aucun souvenir d’abus, et que je crois en mon innocence, je suis désolé pour la souffrance endurée par la personne qui a émis ces accusations comme pour le scandale qu’elles causent. »

Les archidiocèses de New York et Washington n’ont pas évoqué d’autres plaintes. Mais un autre cardinal, Joseph Tobin de l’archidiocèse de Newark, dans le New Jersey voisin de New York, a évoqué trois autres cas d’abus sexuels, sur des adultes. Deux de ces plaintes ont débouché sur des règlements à l’amiable, a-t-il affirmé, sans autre détail.

« La crise des abus dans notre Eglise est dévastatrice. Nous ne pouvons pas défaire ce qui a été fait, mais nous devons continuer à agir avec vigilance », a ajouté le cardinal Tobin.

Protéger la hiérarchie de l’Eglise

Preuve que plusieurs scandales de pédophilie sont passés par là, les cardinaux de New York et Newark ont tenu, dans leur communiqué respectif, à saluer le courage des victimes qui sont sorties du silence.

Une association de défense des victimes des prêtres, « Survivors Network of those Abused by Priests », a, elle, néanmoins souligné que Theodore McCarrick était « bien connu des victimes comme quelqu’un qui protégeait la hiérarchie de l’Eglise au détriment des enfants et des mineurs », et avait combattu les efforts pour réformer les lois sur la prescription des délits d’abus sexuels.

L’association a aussi dénoncé les responsables du New Jersey, « qui savaient mais n’ont rien dit sur les plaintes d’abus sexuels sur des adultes, et sur les paiements effectués » dans le cadre des règlements à l’amiable.

Plusieurs personnes se sont dites choquées par les révélations de ce mercredi, soulignant l’implication de l’ecclésiastique sur les questions de justice sociale, bien avant l’arrivée au Vatican du pape François. « Cela souligne vraiment le cancer que constituent les abus du clergé », a notamment déclaré au Washington Post l’auteur catholique John Gehring.