Marion Marechal lors de l’inauguration de l’Issep à Lyon le 22 juin. / Laurent Cipriani / AP

« Elle est là, je l’ai croisée. » Son nom posé sur une table finit de rassurer la horde de journalistes venus observer le phénomène qu’ils accompagnent depuis plusieurs semaines. Elle arrive, elle est là, préparez micros et caméras. Marion Maréchal fait son entrée, sous les clic-clac des photographes. « Je suis celle qui va probablement le moins parler. » Encore raté.

Vendredi 22 juin, à Lyon, Marion Maréchal – désormais amputée du « Le Pen » – a présenté à la presse son fameux projet « métapolitique » : l’Institut de sciences sociales, économiques et politiques (Issep), une école prônant « excellence » et « enracinement ».

A 28 ans, l’ancienne élue frontiste s’est libérée des contraintes « politiciennes », bourdonne son entourage. Plus question de commenter l’actualité des partis, encore moins la case « extrême droite » occupée par sa tante et son grand-père. A elle, désormais, « le débat d’idées », mais sans la présence de trois journalistes qui se sont vu refuser l’entrée.

« Sans parti pris »

Son école « n’est pas un parti, ni à la botte d’un parti », insiste Marion Maréchal. A la qualification de « Sciences po de droite », elle ironise : « Vous suggérez donc que Sciences po est de gauche, ce n’est pas moi qui l’aurais dit. »

Officiellement, l’Issep ne défend aucune ligne, réaffirme sa directrice, citant de Gaulle et récupérant la figure de Gramsci. D’ailleurs, parmi les 120 professeurs qui auraient postulé spontanément, il pourrait même y en avoir certains de gauche. « Les gens ne mettent pas leur couleur politique sur le formulaire. Ce n’est pas un critère. » Son conseil scientifique, lui, donne toutefois une autre image : un ancien membre du cabinet de François Fillon, le secrétaire général du Mouvement pour la France de Philippe de Villiers, un ancien rédacteur en chef de la version britannique de Breitbart, média de la droite la plus dure connu pour relayer des informations mensongères...

Dans son école sera enseignée une culture générale « très factuelle, sans parti pris » et une « bonne connaissance de tous les enjeux structurants de la société actuelle ou des enjeux à venir qui peuvent toucher notamment aux questions du transhumanisme et de la bioéthique », développe celle qui incarnait la ligne identitaire du Front national et était montée à la tribune lors de la Manif pour tous, en 2016.

« France et chrétienté »

Dans la plaquette présentant les formations, quelques intitulés donnent des pistes sur la future tonalité des cours : « conservatisme aux USA, en Chine et en Russie » ; « France et chrétienté, quel héritage »... D’autres ne peuvent empêcher de prêter à sourire, comme celui pour « réussir un débat ».

Marion Maréchal, elle, balaie une nouvelle fois la question sur l’union des droites, mais acquiesce à celui du « combat culturel ». D’ailleurs, elle ne « s’interdit pas totalement de pouvoir prendre position dans le débat d’idées » en tant que directrice de l’ISSEP, comme elle a déjà pu le faire devant les conservateurs américains, en février, ou lors du rendez-vous « débranchons Mai 68 » du magazine L’Incorrect – dont le rédacteur en chef, Jacques de Guillebon, tient la co-présidence de son conseil scientifique. Deux raouts à la confluence de la droite et de l’extrême droite.

Retour à Confluence justement, le quartier lyonnais de l’Issep. Au coin de la rue menant à l’école « sans objectif politique », on peut apercevoir le siège de la région Auvergne Rhône Alpes, dont le président n’est autre que Laurent Wauquiez, le patron du parti Les Républicains. Sera-t-il invité à l’inauguration ? « Laurent Wauquiez m’a largement évitée pendant cinq ans à l’Assemblée nationale mais s’il veut rattraper le temps perdu, je ne vois pas de blocage de principe », s’amuse l’ancienne députée frontiste de Vaucluse.

Ecartant les questions sur sa famille et l’état de santé de Jean-Marie Le Pen, comme celles sur les détails des comptes de son école, elle se plait davantage à évoquer des discussions en cours avec d’autres écoles, à l’étranger. Notamment en Italie, mais toujours « rien à voir » avec l’actualité politique. D’ailleurs, ses contacts se trouvent « en Italie du sud », sourit-elle.

« La marque Issep dépassera un jour mon nom », espère Marion Maréchal en s’extirpant de la horde. Pas encore gagné. A une minute de la fermeture du rideau, le président honoraire de l’école Patrick Libbrecht ripe, trop heureux du succès de l’exercice du jour : « Lancer une école, c’est difficile mais quand vous bénéficiez de la notoriété de Marion, tout est plus facile ! » Elle se sera prêtée au jeu plus d’une heure, avant de relancer sa « diète médiatique ». Du moins jusqu’à la rentrée.