About 100,000 people fill streets in central London for anti-Brexit march

Lors de la victoire du Brexit au référendum du 23 juin 2016, Nigel Farage avait déclaré que cette date marquerait désormais « le jour de l’indépendance ». Deux ans plus tard, en guise de célébration, l’ancien leader du UKIP, le parti europhobe, a obtenu une nuée de drapeaux européens au centre de Londres. Pour ce deuxième anniversaire du vote, seuls les anti-Brexit se faisaient entendre ce samedi. Plusieurs dizaines de milliers de personnes (100 000, d’après les organisateurs) sont descendues dans la rue.

Leur principale revendication : l’organisation d’un deuxième référendum, cette fois-ci sur l’accord final qui sera négocié entre le Royaume-Uni et l’Union Européenne. « Le premier vote était bien trop vague, ne précisant pas quel genre de Brexit les Britanniques voulaient », estime Richard, interrogé sur place. « Les gens ont voté la première fois sur la base de mensonges », s’agace Stephen Lue. « Maintenant, tout le monde connaît la vérité du Brexit : Airbus a annoncé qu’il risquait de se retirer du pays, la livre sterling s’est effondrée, la question de la frontière entre l’Irlande du Nord et la République d’Irlande n’est toujours pas réglée… » Il tient dans ses mains l’une des pancartes les plus applaudies du défilé : « Fuck Boris », en référence à Boris Johnson, l’un des leaders du camp du Brexit.

A Londres, lors de la marche anti-Brexit, le 23 juin. / NIKLAS HALLE'N / AFP

De fait, beaucoup des manifestants ne croient pas vraiment à un deuxième référendum. Descendre dans la rue est plutôt une façon de dire que le Brexit est, selon eux, une erreur monumentale et historique. « Je ne reconnais plus mon pays », s’inquiète Harry : « C’était un vote raciste, un vote contre l’immigration, qui envoie un message très triste ». Il arbore un slogan très simple, qu’il a peint à la main : « Let’s make Britain nice again » (« Refaisons de la Grande-Bretagne un pays sympa »). « Quand on va à l’étranger maintenant, on se sent obligé de préciser qu’on ne fait pas partie de ceux qui ont voté Brexit », renchérit Debby Kendall. Cette enseignante, qui dit avoir éclaté en sanglots à l’annonce du vote en faveur du Brexit, raconte s’être sentie « en deuil » pendant de longs mois. « Surtout, dites aux Français qu’on n’est pas tous des Brexiters », ajoute Frances.

Une opinion publique divisée

Beaucoup d’Européens étaient aussi dans la foule. Maia, une Néerlandaise, son mari écossais Murdo et leurs deux enfants ont pris un drapeau britannique et un européen pour faire entendre leur émotion. Pour Maia, son statut de résident est compliqué : s’étant arrêtée de travailler pendant trois ans pour élever ses enfants, elle n’a pas les cinq années successives d’activité qui lui donne le droit à la naturalisation britannique. Si elle ne craint pas l’expulsion – les Européens déjà présents au Royaume-Uni pourront rester – elle s’inquiète « d’un lent déclin de [ses] droits ».

A Londres, lors de la manifestation anti-Brexit, le 23 juin. / NIKLAS HALLE'N / AFP

Derrière l’émotion pourtant, ces dizaines de milliers de manifestants n’indiquent pas un profond changement d’opinion outre-Manche. Les sondages montrent que les Britanniques restent divisés en deux camps à peu près égaux, pour et contre le Brexit. Les neuf derniers sondages indiquent bien une avance de deux points pour les personnes en faveur de rester dans l’Union Européenne (52 % contre 48 %), mais cela reste dans la marge d’erreur. Selon John Curtice, spécialiste des sondages à l’université de Strathclyde, chacun campe sur ses positions : 90 % des Britanniques voteraient de la même façon qu’il y a deux ans.

Les manifestants manquent également cruellement de leader. À Londres, samedi, seuls deux personnalités politiques étaient présentes : Vince Cable, le leader des libéraux démocrates (douze députés), et Caroline Lucas, coleader du parti Vert (dont elle est la seule députée). Dans la foule, un chant est revenu régulièrement, condamnant l’absence du leader du parti travailliste : « où est Jeremy Corbyn ? ».

Ce dernier, eurosceptique de longue date, joue à l’équilibriste depuis le référendum, critiquant la version trop dure du Brexit de la première ministre Theresa May, tout en rejetant les appels à un Brexit doux. Entre l’opinion publique qui n’a pas évolué et le paysage politique qui n’est pas favorable, les manifestants auront du mal à obtenir le deuxième référendum qu’ils revendiquent.