« A tous les supporteurs mexicains présents au stade, ne criez pas : “puto”. » Tel est le message qu’a voulu faire passer la Fédération mexicaine de football avant le match de son équipe contre la Corée du Sud, samedi 23 juin à Rostov. Il concerne une tradition footballistique mexicaine qui existe depuis des années, mais qui pourrait finir par attirer des ennuis non seulement à sa fédération, mais aussi à son équipe.

Quand un gardien de but adverse s’apprête à dégager la balle au pied, certains Mexicains entonnent un « Ehhhhhhh » en faisant bouger leurs doigts et, dès que la balle est frappée, ils crient « puto ». En espagnol, le mot se traduit littéralement par « prostitué masculin », et il est largement utilisé comme une insulte homophobe.

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Les instances du football mexicain ont diffusé des messages sur les réseaux sociaux pour sensibiliser ses ressortissants et leur demander d’arrêter ce cri pendant les matchs. « Nous avons été reçus les bras ouverts, il est temps de montrer que nous sommes d’excellents visiteurs », a écrit la Fédération, ajoutant : “rappelez-vous, ce cri n’est pas un soutien.” »

L’attaquant Javier Hernández, une des légendes de l’équipe, et le capitaine Andres Guardado se sont joints à la campagne de sensibilisation, via leurs comptes Twitter personnels. « A tous les fans mexicains, ne criez pas “puto” dans le stade. Ne risquons pas de nouvelles sanctions », a, par exemple, écrit « Chicharito » Hernandez.

Ces multiples appels à la retenue font, en effet, face à des sanctions contre la Fédération mexicaine après la victoire contre l’Allemagne. L’instance disciplinaire de la FIFA lui a imposé une amende de 8 600 euros pour des chants « discriminatoires et insultants », assortissant l’amende d’un avertissement qui « peut faire face à des sanctions supplémentaires en cas de nouvelles infractions de ce type ». Une décision qui s’inscrit dans le cadre de politique de « zéro tolérance envers la discrimination » que l’instance du football mondial a instauré pour la Coupe du monde.

Rappels à l’ordre, amendes et bien pire encore

Ce n’est pas la première fois que le Mexique prend une amende pour des cris discriminants. Pendant les matchs de qualification pour cette Coupe du monde, la Fédération mexicaine a été rappelée à l’ordre une douzaine de fois, à chaque fois à cause de ce chant homophobe. Elle a reçu des avertissements pour les deux premiers et des amendes pour les autres, selon le New York Times.

L’approche plus ferme de la FIFA envers les chants homophobes dans les stades date d’après la Coupe du monde 2014 au Brésil. Dans cette compétition, les putos ont été entendus à plusieurs reprises, sans que personne ne s’en émeuve. Depuis, tout le monde, de la FIFA jusqu’aux instances locales en passant par les joueurs, fait campagne pour éradiquer le chant, y compris au niveau local. Des messages comme « Crier “puto” ne te rend pas plus mexicain » ou « le problème n’est pas que tu chantes, c’est le mot que t’utilises » sont apparus dans des matchs du championnat mexicain. Autant de mesures sans effet puisque le chant a bien résonné pour l’entrée en lice du « Tri » en Russie.

Les sanctions, financières jusqu’ici, pourraient devenir plus graves s’il continuait à résonner. Les « sanctions supplémentaires » auxquelles a fait allusion la FIFA pourraient être une perte de points et, si l’instance internationale veut vraiment être implacable, l’exclusion du tournoi, rapporte El Universal. Quant aux individus reconnus coupables de crier le mot interdit, ils seront expulsés du stade et verront leur « Fan ID », qui permet d’assister au Mondial, révoqué.

La campagne de sensibilisation est également diffusée par les médias mexicains, et leurs journalistes présents en Russie. Le spectre d’une sanction plus lourde qu’une simple amende semble en avoir fait réfléchir certains, comme ces Mexicains qui promettent de ne pénaliser leur sélection. Ils vont continuer à crier lors du dégagement du gardien adverse, mais ce sera désormais : « Ehhhhhh… Mexico ! »