« Je Préférerais ne pas », de Justin Wong (traduit du chinois par Bertrand Speller). Editions Rue de l’échiquier, 144 pages, 19,90 euros. / Libre

Livre. Dans un style original, moitié BD moitié graphisme numérique, Je Préférerais ne pas, de Justin Wong, auteur de bande dessinée de Hongkong né en 1974, raconte avec humour, à la façon d’un journal de bord, l’histoire de Butt, trentenaire célibataire, « congédié » par son entreprise à Hongkong et confronté à sa nouvelle vie. Difficile avec ce titre de ne pas penser au personnage de Bartleby créé par Herman Melville, en 1853, et qui fuit le travail.

Jusque-là, « un machin qu’on appelle emploi du temps » avait assuré la soumission de Butt au quotidien. Il va enfin pouvoir, sans « l’ombre d’un regret », « faire la grasse mat’ », « jouer à la console comme un ouf », bouquiner, aller au théâtre, faire du sport, créer un groupe d’inactifs sur Facebook, passer une bonne partie de son temps dans son lit, mais certainement pas chercher un job ! L’occasion pour l’auteur de jeter un regard ironique sur son CV (« Et vous, à ma place, dans un CV, vous mettriez quoi ? »), qui fait l’impasse sur ses défauts : double jeu avec ses collègues, cupidité, refus « de finir essoré »

Dans une ultime pirouette, Butt raconte sa visite du « fameux rocher historique sur lequel Napoléon s’était soulagé la vessie », le conservateur du lieu lui expliquant que depuis trente ans, son « boulot, c’est de pisser sur ce rocher » pour s’assurer « que cette urine soit la plus fraîche possible »… Tout un symbole pour Butt – dont le « fais ce qu’il te plaît » interpelle sur notre relation au travail – et le déclic pour lui donner envie de retourner au boulot… « tout en demeurant inactif ».

« Je Préférerais ne pas », de Justin Wong (traduit du chinois par Bertrand Speller). Editions Rue de l’échiquier, 144 pages, 19,90 euros.