Neymar et le Brésil sont toujours en course en Coupe du monde. / CARLOS GARCIA RAWLINS / REUTERS

Le jeu de massacre est terminé. La faucheuse, qui a fait des ravages avec les éliminations de l’Allemagne, de l’Espagne, de l’Argentine et du Portugal, a stoppé au moins provisoirement sa course folle. A ce rythme échevelé, sans faire offense à la Suisse, la Suède, au Japon ou encore à la Russie, la finale prévue le 15 juin à Moscou avait de quoi réjouir les amateurs de grosse cote mais quelque peu décevoir les amoureux des belles affiches qui ont fait le sel de la Coupe du monde.

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Orpheline de Cristiano Ronaldo et de Lionel Messi, la FIFA peut donc souffler : sa compétition majeure conserve encore l’une des trois superstars du football mondial. Poing levé, torse nu et tatouages au vent après la qualification en quart de finale, l’enfant terrible du trio a bel et bien lancé son tournoi. Grâce à un but et à une passe décisive de Neymar, l’hécatombe des favoris en huitièmes de finale a épargné le Brésil, vainqueur aisé du Mexique (2-0), lundi 2 juillet. « Nous devons apprendre à souffrir. C’était un match très difficile, nous connaissions la qualité de l’adversaire. Je suis très content de ma performance, mais encore plus de la victoire de l’équipe », a lancé la vedette rescapée.

Sur la pelouse de l’Arena de Samara, l’attaquant brésilien a montré toute sa fantaisie et ses quelques coups d’éclat géniaux ont illuminé la partie, à l’image de l’action où son accélération et sa passe subtile ont offert à Roberto Firmino le deuxième but de la Seleçao. Sur l’ouverture du score, au départ d’un superbe mouvement, son dribble soudain et sa talonnade décale Willian dont le centre est repris d’un tacle rageur par le no 10 en personne. Porté en triomphe sur les épaules du solide Paulinho, Neymar a affiché contre les Mexicains une forme ascendante.

Au tour de Neymar

Transparent face à la Suisse (1-1), en larmes après son but in extremis face au Costa Rica (2-0) et plus consistant face à la Serbie (2-0), Neymar a semble-t-il entendu l’appel lancé avant le match par Thiago Silva, son coéquipier au PSG comme en sélection. « Je me suis dit que dans notre match ce sera au tour de Neymar. Mbappé et Cavani [chacun auteur d’un doublé pour la France et l’Uruguay] ont tous les deux été fondamentaux, espérons qu’il sera aussi inspiré qu’eux », avait déclaré le défenseur en parlant de ses trois camarades parisiens.

Parfaitement entouré et secondé, par ses lieutenants Coutinho et Willian, aussi fort soit-il, Neymar ne fera pas gagner le Brésil à lui tout seul. A l’inverse, le Brésil ne pourra pas gagner sans un très bon Neymar, dont la blessure fin mars avec le PSG avait alarmé le pays. Le staff brésilien a tout fait pour que l’idole se concentre uniquement sur son rétablissement et sur cette Coupe du monde que le Brésil n’a plus gagnée depuis 2002. Quitte à négliger son club.

Après le troisième match, le sélectionneur Tite, dont il est très proche (il a tenté de le faire venir au PSG), avait pris soin de souligner les efforts de son protégé :

« D’habitude je ne raconte pas ce qui se dit dans le vestiaire, mais là je vais le faire. J’ai dit à Neymar : “Tu as trop bien joué.” Il a retrouvé son meilleur niveau, celui d’avant sa blessure, et ça, c’est très difficile. »

Neymar crie de douleur après un contact avec un joueur mexicain. / Sergei Grits / AP

Neymar ne serait pas Neymar, c’est-à-dire un immense footballeur, sans un ego surdimensionné et un sens du spectacle, qui tend parfois vers la comédie. Sa performance aujourd’hui s’est agrémentée d’une propension aux cabrioles. Même si Neymar a subi la bagatelle de 22 fautes depuis le début du tournoi, plus que n’importe qui, sa façon de surjouer certaines fautes énerve ses adversaires.

« Ce n’est pas un péché de provoquer par le dribble »

En deuxième période, Miguel Layun a ainsi légèrement touché la cheville droite du Brésilien, à terre, un geste critiquable (non sanctionné par l’arbitre) mais qui ne méritait peut-être pas les roulades qui ont suivi. Ni les commentaires quelque peu aigris du sélectionneur mexicain, Juan Carlos Osorio : « C’est un mauvais exemple pour le monde et tous les enfants qui regardent le match. »

Le caractère un brin égotique de Neymar agace aussi parfois jusqu’à ses propres coéquipiers. Après un incident intervenu lors de la victoire contre le Costa Rica, son capitaine Thiago Silva l’avait même recadré publiquement :

« Aujourd’hui, j’ai été très triste de son comportement. Au moment où j’ai rendu le ballon, il m’a insulté. Mais je crois que j’ai eu raison, parce qu’ils perdaient beaucoup de temps. »

Difficile de lui en tenir rigueur très longtemps. Lors des dix-neuf derniers matchs du Brésil, Neymar a inscrit onze buts et réussi neuf passes décisives. De quoi donner envie de défendre son joyau contre la mauvaise réputation et les critiques excessives. « Il aime jouer, des fois les gens ne comprennent pas, mais il est très agile, très vif, ce n’est pas un péché de provoquer par le dribble dans les dernières minutes, c’est ce que demande le coach », a plaidé Tite.

Qu’en pense le principal intéressé ? « Je me moque des critiques, et je ne m’occupe pas de celles de la presse non plus », a-t-il asséné. Le Brésil n’est pas le seul à avoir besoin de Neymar. Le spectacle de la Coupe du monde dépend du talent d’un tel joueur, aussi irritant puisse-t-il parfois être.