Mais qu’a voulu dire Emmanuel Macron en parlant des « déportations » de migrants ? Les déclarations du président de la République, à Versailles, sur ce dossier qui empoisonne les relations diplomatiques européennes, ont interrogé tous les observateurs. En assurant que « jamais la France n’acceptera les solutions de facilité que d’aucuns aujourd’hui proposent, qui consisteraient à organiser des déportations, à travers l’Europe, pour aller mettre dans je ne sais quel camp, à ses frontières ou en son sein ou ailleurs, les étrangers non admis », le chef de l’Etat visait en réalité les autorités autrichiennes.

L’Autriche, qui a pris la présidence de l’Union européenne le 1er juillet, a affiché son intention de « juguler l’immigration illégale » et d’externaliser totalement le droit d’asile hors des frontières de l’UE. Dans une note confidentielle soumise lors d’une réunion informelle les 2 et 3 juillet et révélée par Le Monde, Vienne affirmait même vouloir créer des « hot spots » (centres de regroupement des migrants) en dehors du territoire européen, notamment en Albanie.

C’est à cette proposition contrevenant à la Convention de Genève et au principe de non-refoulement des migrants, que M. Macron aurait répondu. « Il a rappelé la position de la France qui est : oui aux centres pour migrants mais pas fermés et pas au sein de l’Europe, pas à l’extérieur », précise-t-on au ministère de l’intérieur.

Apparaître en défenseur du droit d’asile

La France avait déjà tenté de faire entendre sa voix pour atténuer le raidissement des mesures anti-migrants portés par le groupe de Visegrad (Hongrie, Pologne, République tchèque et Slovaquie), dans l’accord de Bruxelles du 29 juin. M. Macron avait insisté pour que la création des « centres contrôlés » dans l’UE – où sont regroupés les migrants le temps que leur demande d’asile soit examinée – se fasse « sur une base volontaire » et avec l’aide du Haut-Commissariat des Nations unies pour les réfugiés et de l’Organisation internationale pour les migrants.

Quant aux « plates-formes de débarquement » de migrants hors de l’UE pour dissuader les traversés de la Méditerranée, elles se feront aussi sur une base volontaire. Le chef de l’Etat avait précisé que la France n’ouvrirait pas de tels centres, n’étant pas « un pays de première arrivée ».

M. Macron a tenté ainsi, lundi, d’apparaître en défenseur du droit d’asile après l’émotion soulevée par l’errance de l’Aquarius et le refus d’accueillir les migrants à son bord. Et de faire oublier que la France a changé plusieurs fois de position sur les centres fermés depuis un an.