L’arbitre argentin Nestor Pitana écoute le signalement de son assistant chargé de la vidéo, dimanche 15 juillet, à Moscou. / FRANCK FIFE/AFP

Mains sur les hanches, un attaquant se prépare au point de penalty. Une nuée d’adversaires tournent autour de l’arbitre, qui pour l’influencer, qui pour le houspiller. Cet été, ces scènes avaient quelque chose d’historique. Pour la première fois en Coupe du monde, les arbitres pouvaient recourir à des ralentis vidéo avant de trancher toute décision litigieuse. Notamment pour des fautes commises dans la surface de réparation.

Les Bleus ont sûrement apprécié. Dimanche 15 juillet, les nouveaux champions du monde ont fini le tournoi comme ils l’avaient commencé, en principaux bénéficiaires de cette nouvelle règle. Juste avant la mi-temps de la finale contre la Croatie, au stade Loujniki de Moscou, Nestor Pitana entre en action. Sur un corner d’Antoine Griezmann, l’attaquant croate Ivan Perisic touche le ballon de la main. L’arbitre argentin demande la VAR, acronyme anglais pour « assistance vidéo à l’arbitrage », et accorde un penalty. Griezmann transforme la sentence : un but primordial, sans doute le tournant du match, qui permet alors aux Français de mener (2-1) à la pause.

Précision : l’arbitre avait au départ laissé le jeu se poursuivre, sans le moindre coup de sifflet. Jusqu’à ce que son oreillette lui indique le signalement de son assistant chargé de la vidéo, l’Italien Massimiliano Irrati. « En fait, quand l’arbitre est allé voir la vidéo, je ne savais pas pourquoi, j’ai demandé à Olive [Giroud], et il m’a dit qu’il y avait main », relate « Grizou », désigné homme du match. « J’ai essayé d’être dans mon coin, un peu seul, et quand il a sifflé penalty, de faire comme si c’était un match de championnat, et garder mon calme et mon sang-froid », poursuit l’attaquant français.

« On n’accorde pas ce genre de penalty en finale »

Subsiste toujours cette question, cette part d’incertitude : sans l’appui de la vidéo, l’arbitre aurait-il pris la même décision ? « On n’accorde pas ce genre de penalty en finale », regrette le sélectionneur croate, Zlatko Dalic. Qui poursuit avec cette phrase contradictoire : « S’il vous plaît, ne me faites pas dire des choses négatives sur l’arbitre. » Selon l’entraîneur, qui refuse d’attribuer à ce penalty l’entière responsabilité de sa défaite, la vidéo reste « une bonne chose pour le football » : « La VAR, c’est bien quand c’est en votre faveur. C’est moins bien quand c’est en votre défaveur. » Le milieu Ivan Rakitic, lui, a eu des mots plus tranchés : le joueur a trouvé « le penalty très, très douteux… Ça fait très mal de perdre comme ça ».

Dix penaltys validés au premier tour

Le 16 juin, pour leur entrée en matière, les Bleus avaient déjà profité de la vidéo. Griezmann ouvrait le score contre l’Australie sur penalty, là encore après une décision « vidéosurveillée ». Une grande première dans l’histoire du tournoi. Un but important : juste avant l’heure de jeu, à Kazan, les Bleus se demandaient toujours comment inscrire leur premier but du Mondial… Ce jour-là, l’usage de la vidéo a sanctionné un tacle de Josh Risdon sur Antoine Griezmann. Un penalty « assez controversé », selon le sélectionneur néerlandais de l’équipe océanienne, Bert van Marwijk : « Le langage corporel de l’arbitre montrait qu’il n’était pas très sûr de lui. »

« La VAR rend le football plus honnête et plus transparent »

A peine instaurée, déjà contestée : innovation majeure, car substitut à l’arbitrage humain, la VAR a occupé le terrain pendant tout ce Mondial russe. Ne serait-ce qu’au premier tour, son utilisation a conduit à la validation de dix penaltys – dont sept transformés – sur quarante-huit matchs. « La VAR rend le football plus honnête et plus transparent », martelait encore Gianni Infantino, l’avant-veille de la finale. Le président de la Fédération internationale de football (FIFA) est d’autant plus enclin à défendre ce nouveau dispositif, instauré en mars, qu’il en a fait l’un des actes marquants depuis son élection, en février 2016.

A chaque patron du foot mondial son innovation en la matière. En 2012, l’ex-numéro 1 de la FIFA, Sepp Blatter, militait pour l’introduction de la goal line technology (GLT). Depuis, toujours à l’œuvre, le dispositif sert à vérifier si le ballon a bel et bien franchi la ligne de but. Pour justifier cet ajout, le dirigeant suisse invoquait le but injustement refusé à l’Anglais Frank Lampard contre l’Allemagne, en huitièmes de finale du Mondial 2010, en Afrique du Sud.

La GLT a été utilisée pour la première fois par la FIFA lors de la Coupe du monde 2014, au Brésil. Pour ses grands débuts dans le tournoi, l’attaquant français Karim Benzema avait vu son but ainsi validé lors de la victoire (3-0) sur le Honduras, à Porto Alegre. Déjà, les Bleus s’étaient distingués comme les premiers bénéficiaires d’un dispositif technologique.