C’est par un tweet qu’Alvaro Uribe, président de la Colombie de 2002 à 2010, a annoncé sa démission du Sénat. Cette décision survient après que la Cour suprême colombienne a révélé qu’elle menait une enquête sur des faits de corruption le visant.

L’ancien président a déclaré se sentir « moralement empêché » de continuer sa charge de sénateur tout en se défendant des accusations portées à son endroit. « J’ai agi en accord avec la loi et mes droits », a-t-il écrit sur Twitter. Depuis plusieurs années, l’influent ex-chef de l’Etat a été impliqué dans un épineux conflit juridique en raison de sa proximité avec des groupes paramilitaires affiliés à la droite – des liens qu’il a toujours niés.

M. Uribe a accusé Ivan Cepeda, un sénateur situé à l’autre extrémité du spectre politique, d’avoir fait pression sur des détenus afin que ceux-ci fassent de fausses déclarations affirmant que l’ancien président était lié à des groupes paramilitaires. La Cour suprême colombienne n’a trouvé aucun élément de preuve permettant d’étayer les affirmations de M. Uribe. Elle a, en revanche, décidé de poursuivre l’ex-président pour avoir manipulé des témoins.

« Nul n’est au-dessus des lois »

Dans un communiqué paru le 24 juillet, la Cour suprême a rapporté avoir, à la suite d’une longue enquête, mis en examen M. Uribe pour des faits de fraude procédurale et de subornation de témoins. Peu diserte sur les allégations pesant sur l’ancien président, la cour a en revanche indiqué que l’enquête avait été mise à l’arrêt depuis le mois de février, en raison de pressions exercées sur les témoins par des proches de l’ancien président colombien. « La Colombie montre, aujourd’hui, que nul n’est au-dessus des lois », a déclaré M. Cepeda.

Depuis le début de sa carrière politique, M. Uribe a été accusé d’entretenir des liens étroits avec les cartels de drogue et les paramilitaires. En 1980, l’agence d’aviation civile qu’il dirigeait a été accusée d’accorder des licences d’aviation à des trafiquants de drogue. Les câbles diplomatiques du département d’Etat américain, déclassifiés en mai 2018, ont mis en évidence les liens de M. Uribe avec les cartels de la drogue.

Un rapport de la DIA (Defense Intelligence Agency), datant de 1991, le présente comme un « politicien collaborant avec le cartel de Pablo Escobar aux plus hauts niveaux du gouvernement ». En 1984, un hélicoptère immatriculé au nom du père de M. Uribe a été retrouvé dans l’un des plus grands laboratoires de stupéfiants d’Amérique latine.

Accusations de viols

En janvier 2018, M. Uribe a également été soupçonné d’être coupable du viol subi, plusieurs années auparavant, par la journaliste colombienne Claudia Morales. Cette dernière avait indiqué que son agresseur était un personnage important de la vie nationale. « Vous le voyez et vous l’écoutez tous les jours », a-t-elle déclaré lors d’un entretien radiophonique.

Craignant pour sa vie et celle de sa fille, la journaliste a décidé de ne pas dévoiler le nom de son agresseur – indiquant cependant qu’il s’agissait de son supérieur hiérarchique. Claudia Morales a travaillé, entre 2003 et 2004, pour le service de la présidence de la République.