Le président Emmerson Mnangagwa a réclamé une « enquête indépendante » sur « les événements tragiques » de mercredi, afin que « les responsables soient jugés ». / AP

Le Zimbabwe entre, jeudi 2 août, dans sa troisième journée d’attente fébrile des résultats d’une présidentielle « historique ». Mercredi, la journée a été marquée par une répression meurtrière de l’armée contre une manifestation d’opposants du Mouvement pour le changement démocratique (MDC), qui dénonçaient des fraudes aux élections générales après l’annonce du triomphe au Parlement du parti au pouvoir, l’Union nationale africaine du Zimbabwe-Front patriotique (ZANU-PF, pour Zimbabwe African National Union-Patriotic Front, en anglais). L’opposition revendique aussi la victoire.

Jeudi, le président zimbabwéen, Emmerson Mnangagwa, a réclamé une « enquête indépendante » sur « les événements tragiques » de la veille, afin que « les responsables soient jugés ». Avant d’appeler au calme : « Il est plus important que jamais que nous soyons unis et que nous nous engagions à résoudre nos différends pacifiquement (…) et dans le cadre de la loi », a-t-il déclaré sur son compte Twitter :

« Nous avons été en contact avec Nelson Chamisa [leader de l’opposition] pour discuter de la façon de désamorcer la situation et nous devons maintenir ce dialogue afin de protéger la paix qui nous tient à cœur. »

Les appels au calme se multiplient également au sein de la communauté internationale. Jeudi, le Commonwealth a dénoncé « l’usage excessif de la force » contre les manifestants. Mercredi, les Etats-Unis se sont dits « profondément inquiets », appelant dans la soirée l’armée « à faire preuve de retenue quand elle disperse les manifestants ».

Idem pour l’ancienne puissance coloniale britannique, qui a appelé au « calme et à la retenue » et exhorté « les leaders politiques à assumer leurs responsabilités… à ce moment critique », et pour l’Organisation des Nations unies qui a pressé le gouvernement et l’opposition à rejeter « toute forme de violence ».

Trois morts

Lundi, les Zimbabwéens s’étaient rendus en masse et dans le calme aux urnes pour les premières élections présidentielle, législatives et municipales organisées depuis la chute de Robert Mugabe en novembre, après trente-sept ans au pouvoir.

Les résultats officiels de la présidentielle, opposant lundi Emmerson Mnangagwa, le président sortant, et le leader de l’opposition Nelson Chamisa, ne sont pas encore connus, mais ce dernier a déjà affirmé qu’ils étaient en train d’être truqués.

En revanche, des résultats partiels des législatives ont été annoncés mercredi, donnant une victoire écrasante aux législatives de la ZANU-PF, le parti au pouvoir depuis 1980. Des partisans de l’opposition sont alors descendus dans la rue à Harare, la capitale, pour crier à la fraude. L’armée a ouvert le feu sur les manifestants et trois personnes ont été tuées, selon la police.

« Intimidations d’électeurs »

Les scrutins de l’ère Mugabe ont été régulièrement entachés de fraude et de violences. M. Mnangagwa, son successeur et ancien bras droit, avait promis des élections justes, pacifiques et transparentes, et invité des observateurs occidentaux – une première en seize ans.

Mais les observateurs de l’Union européenne (UE) ont dénoncé « l’inégalité des chances » entre les candidats et des « intimidations d’électeurs », en soulignant toutefois que le climat politique s’est « amélioré » au Zimbabwe.

Robert Mugabe, écarté par un coup de force de l’armée et de son parti, après être entré en crise ouverte avec Emmerson Mnangagwa, avait été contraint de démissionner en novembre après presque quatre décennies au pouvoir.