« League of Legends » est l’un des jeux vidéo les plus populaires parmi les amateurs d’e-sport. / Jasen Vinlove / USA TODAY Sports

C’est une très longue enquête de Cecilia D’Anastasio, entamée en décembre, qu’a publié mardi 7 août le site spécialisé en jeux vidéo Kotaku. Pendant des mois, la journaliste s’est entretenue avec 28 anciens et actuels employés, hommes et femmes, de Riot Games, le développeur du jeu vidéo League of Legends, au succès phénoménal.

Au cœur de son enquête : la question des conditions de travail au sein de l’entreprise américaine qui compte 2 500 employés, décrites comme étant particulièrement hostiles à l’égard des femmes.

Elle rapporte ainsi des propos déplacés, condescendants ou sexistes tenus au sein de l’entreprise, verbalement ou par mail. Des femmes, mais aussi des hommes, racontent également avoir reçu des photos sexuellement explicites de la part de leurs collègues et de leurs supérieurs. Plus généralement, l’enquête de Kotaku dépeint une entreprise masculine à 80 %, dont l’ambiance « de potes », particulièrement grivoise, évoque celle des fraternités d’étudiants.

Plusieurs témoignages concordant font état des difficultés rencontrées par des employées pour progresser au sein de l’entreprise. Plusieurs d’entre elles rapportent ainsi que, après qu’elles eurent beaucoup travaillé pour obtenir une promotion, le poste convoité avait été proposé à un homme bénéficiant de moins d’expérience. L’équipe dirigeante de Riot Games compte d’ailleurs 21 hommes, pour 2 femmes seulement.

Des compétences remises en question

Ce déséquilibre entre le nombre d’hommes et de femmes employés par Riot Games s’explique aussi, selon l’enquête, par les méthodes de recrutement du développeur. Lors des entretiens d’embauche, les recruteurs mettraient ainsi l’accent sur l’importance de valeurs « agressives », mais aussi d’appartenir à la culture « gamer ». Et ils remettraient systématiquement en cause la sincérité des candidates se définissant comme des joueuses assidues de jeux pointus, tels que World of Warcraft ou League ou Legends, le jeu développé par Riot Games.

De fait, seuls 10 % des joueurs de League of Legends sont des joueuses, réduisant d’autant le nombre de candidates et de recrues potentielles. Celles-ci seraient en effet souvent découragées par le comportement agressif des joueurs. Kotaku rappelle d’ailleurs l’existence d’une étude menée en interne par Riot Games, dont il ressort qu’un quart des employés remerciés sont aussi des joueurs au comportement déplacé.

Dans un long communiqué envoyé à Kotaku, Riot Games se défend de laisser proliférer ce genre de comportements. « Nous avons une politique de tolérance zéro en ce qui concerne la discrimination, le harcèlement, la rétorsion, les mauvais traitements et la toxicité en général », a déclaré le développeur. Selon lui, les comportements décrits dans l’article de Kotaku sont « à l’exact opposé » de ses valeurs. Il existe en outre au sein de l’entreprise un poste de responsable « diversité et inclusion ».