A 33 ans, Mahiedine Mekhissi a largement dominé la finale du 3 000 m steeple en 8 min 31 sec 66, jeudi 9 août à Berlin. / Michael Sohn / AP

La première partie du plan de Mahiedine Mekhissi vient de se dérouler sans accroc. Jeudi 9 août à Berlin, le coureur français est devenu champion d’Europe du 3 000 m steeple avant de viser peut-être un doublé sur 5 000 m samedi. Il a dominé assez facilement l’Espagnol Fernando Carro et l’Italien Yohannes Chiappinelli dans un temps de 8 min 33 s 59. L’autre Français, Yoann Kowal, échoue à la quatrième place.

« Les médailles ont toutes les mêmes saveurs. Tenir au plus haut niveau pendant dix ans, ce n’est pas facile. Je voulais absolument défendre mon titre. Ça a été une des courses les plus dures au point de vue de l’émotion. Il y a eu beaucoup de stress et de pression car ça n’a pas été facile cette saison », a-t-il commenté au micro de France Télévisions.

Mahiedine Mekhissi s’est montré heureux et il a pour la première fois évoqué une possible fin de carrière : « L’équipe de France avait besoin de médailles. C’est la deuxième. J’essaie de faire mon boulot. Une cinquième en or, c’est exceptionnel et historique. Je ne me rends pas encore compte mais je suis en train de me dire que je vais peut-être arrêter bientôt. Je suis en pleine réflexion sur la suite. »

Athlète tricolore le plus titré

Le Rémois de 33 ans compte désormais cinq médailles d’or européennes (quatre en 3 000 m steeple et une en 1 500 m), ce qui en fait l’athlète tricolore le plus titré devant Christophe Lemaitre. Il rejoint le cercle très fermé des quintuples champions continentaux, constitué de l’Allemand Harald Schmid (400 m haies et 4 × 400 m) et des Britanniques Roger Black (400 m et 4 × 400 m) et Mo Farah (5 000 et 10 000 m). Avant la finale, il se montrait volontaire pour aller chercher ce nouveau titre : « Cela ne va pas être simple, même quand on est favori. Quand on est tête d’affiche et qu’on est numéro un, on est attendu et les gars ne vont pas te laisser courir et te laisser la victoire, c’est à moi de m’employer et d’aller chercher ce titre. »

Cela fait dix ans que Mekhissi use ses pointes sur les pistes d’athlétisme. Déboulé de nulle part ou presque en 2008 pour s’emparer de la première de ses trois médailles olympiques à Pékin, le spécialiste du 3 000 m steeple s’est construit l’un des plus beaux palmarès de l’athlétisme français, même s’il n’a jamais goûté à l’or mondial ou olympique, faute à la maestria kényane dans cette discipline.

Personnalité atypique, le champion ne laisse personne indifférent. En 2014, lors des championnats d’Europe à Zurich, il avait survolé le 3 000 m steeple avant d’être disqualifié pour une cause tout à fait insolite, un strip-tease inédit. Lors du passage du dernier obstacle, il avait retiré son maillot, passant la ligne d’arrivée torse nu, contrevenant à un point de règlement méconnu.

Objectif : 5 000 m

Quelques jours plus tard, il avait pris une éclatante revanche en réalisant une course extraordinaire pour remporter le 1 500 m, une discipline dont il n’était pas spécialiste. Dans un entretien à L’Equipe jeudi, il est revenu avec humour sur cette mésaventure rocambolesque : « Maintenant, à Berlin, pour la finale du steeple, peut-être que j’enlèverai mon maillot… mais je le remettrai avant la ligne. J’ai le droit puisque la règle dit juste qu’il faut passer la ligne avec son maillot. »

Bouté hors du podium des Mondiaux de Londres l’an passé par l’Américain Evan Jager, Mahiedine Mekhissi possède encore une marge importante en Europe. En effet, même si son meilleur chrono de l’année était assez moyen au regard de son record personnel (8 min 16 s 97 contre 8 min 0 s 09 en 2013), il est arrivé à Berlin fort d’une première place au bilan continental.

Samedi, le 5 000 m sera bien moins aisé pour lui, qui est un quasi-néophyte sur cette distance en compétition. « Je n’ai fait qu’un 5 000 m dans ma vie, au mois de mai [en 13 min 20 s 53, sixième temps continental cette saison]. Il faudra bien aborder toutes les courses, ne pas laisser de plumes en finale du 3 000 m steeple, pour être performant sur 5 000 m, déclarait-il avant de conserver son titre sur le steeple, mais il ne faut pas non plus se préserver, sinon tu te mets en danger par rapport à la finale du 3 000 m steeple. Tu peux te faire avoir, il faut donc trouver le bon équilibre. »

Le doublé du Français n’en aurait que plus de force et de retentissement, surtout qu’il lui permettrait de devenir, cette fois-ci seul, l’athlète le plus titré de l’histoire des championnats d’Europe d’athlétisme. A l’heure où il pense à une possible retraite, cela serait le moment idéal.