L’annonce de la « stratégie de lutte contre la pauvreté des enfants et des jeunes », ou plus simplement du plan pauvreté du gouvernement annoncé dès octobre 2017 et repoussé plusieurs fois depuis, est désormais attendue pour le 15 septembre. Au début du mois de juillet, les associations déçues de ce retard étaient reçues à déjeuner à l’Elysée.

Dans un entretien au Journal du dimanche le 12 août, Agnès Buzyn, ministre des solidarités et de la santé chargée de ce dossier aux côtés d’Olivier Noblecourt, délégué interministériel à la lutte contre la pauvreté, dévoile la philosophie du projet : « Les prestations monétaires ont jusqu’ici permis de réduire l’impact de la crise économique, pas de diminuer les inégalités de destin. En France, quand on naît dans une famille pauvre, on le reste pendant des générations. » Autrement dit, il n’est pas question de revaloriser les aides sociales « monétaires », notamment le revenu de solidarité active (RSA). « C’est vrai que les aides financières ne règlent pas tout, mais elles restent indispensables pour survivre et avoir accès aux autres droits, l’école, la culture… », estime Claire Hédon, présidente d’ATD Quart Monde.

La ministre confirme aussi qu’en 2019 sera mis en place le versement unique des allocations, un premier pas, en moins ambitieux, vers l’allocation sociale unique dont l’échéance est repoussée en 2020 ou 2021 et sur laquelle travaille Julien Damon, sociologue et économiste. Ce versement est unique en ce que toutes les allocations sont versées au même moment, sur les mêmes critères, épargnant au bénéficiaire de multiplier les justificatifs, et s’adaptent à ses ressources du moment. La réforme est facilitée par l’instauration du prélèvement à la source de l’impôt sur le revenu.

Montants ajustables

Les allocations deviennent automatiques, sans avoir à les demander ce qui diminuerait les cas de « non-recours » qui, pour le RSA, par exemple, concernent environ 30 % des bénéficiaires potentiels. De même, les montants s’ajustent immédiatement aux variations de revenus. « Il n’y aurait plus le décalage actuel de deux ans entre les revenus pris en compte et le calcul du montant de l’aide, espère Mme Hédon. Mais attention à ne pas rendre ces aides trop instables et variables d’un mois à l’autre, au gré d’une reprise d’emploi à temps partiel par exemple. Cela risque d’aggraver l’incertitude du lendemain, qui caractérise la pauvreté. »

Agnès Buzyn annonce également « la création d’un fonds d’investissement social abondé de plusieurs millions d’euros ». « C’est une bonne nouvelle, car nous avons besoin de ces outils pour expérimenter, juge Mme Hédon, mais l’évaluation de ces innovations doit s’intéresser d’abord aux 20 % parmi les plus pauvres. C’est l’objectif que nous voudrions voir inscrit dans la loi. »