Le président mauritanien, Mohamed Ould Abdelaziz, lors du sommet de l’Union africaine à Nouakchott, le 2 juillet 2018. / LUDOVIC MARIN / AFP

Les Mauritaniens se rendent aux urnes, samedi 1er septembre, pour des élections législatives, régionales et locales qui constituent un test pour le régime du président Mohamed Ould Abdelaziz à moins d’un an de la présidentielle de la mi-2019. Un nombre record de 98 partis politiques participent à ces élections auxquelles sont appelés plus de 1,4 million d’inscrits. En cas de second tour, celui-ci se tiendra le 15 septembre.

Malgré les appels de l’opposition et alors qu’opposants et ONG dénoncent régulièrement des atteintes aux droits humains, dont, récemment, l’arrestation d’un ancien sénateur et le maintien au secret d’un blogueur accusé de blasphème, le scrutin se déroulera en l’absence d’observateurs internationaux.

Amnesty International a fustigé récemment les « arrestations et détentions » de deux opposants et militants antiesclavagistes, estimant qu’il s’agissait des « pires signaux d’intimidation, de harcèlement et de répression par les autorités mauritaniennes des voix dissidentes » à l’approche de ces élections.

« Lutte contre la gabegie »

La campagne électorale, qui s’achève jeudi soir, n’a pas déchaîné les passions, et les meetings électoraux ont attiré peu de monde dans ce vaste pays aride d’Afrique de l’Ouest, malgré le caractère crucial du scrutin tant pour le pouvoir que pour l’opposition, qui, cette fois, a décidé d’y participer, y compris dans ses composantes dites « radicales ».

A 61 ans, Mohamed Ould Abdelaziz, un ancien général arrivé au pouvoir par un coup d’Etat en 2008, puis élu en 2009 et réélu en 2014, a appelé à un « vote massif » pour sa formation, l’Union pour la République (UPR), « afin de continuer sur la voie des réalisations grandioses et de la lutte contre la gabegie », qualifiant au passage les dirigeants de l’opposition de « malfaiteurs » et de « fauteurs de troubles ».

L’opposant historique Ahmed Ould Daddah, chef du Rassemblement pour la démocratie (RFD), a demandé aux Mauritaniens d’effectuer « le sursaut nécessaire pour balayer le régime de la dictature et de la faillite généralisée ». Le RFD fait partie de la coalition de l’opposition radicale, dont les membres se présentent sur des listes communes en certains endroits et qui se sont engagés à se soutenir au second tour.

Baisse du pouvoir d’achat

Pour convaincre, l’UPR, large vainqueur des précédentes législatives en 2013, boycottées par la quasi-totalité de l’opposition radicale, met en avant la révision de la Constitution de 2017, qui a aboli le Sénat et donné au pays un nouvel hymne et un nouveau drapeau évoquant le « sacrifice des martyrs » de la résistance à la colonisation française, qui s’est achevée en 1960.

Sur le plan économique, le pouvoir insiste sur une croissance retrouvée, « de 3 % en 2017 », et sur « un indice de pauvreté à 31 %, contre plus de 40 % en 2008 », dans un pays d’un peu moins de 4 millions d’habitants dont le taux d’alphabétisation reste faible.

L’opposition, quant à elle, dénonce une forte baisse du pouvoir d’achat, notamment depuis l’introduction, le 1er janvier, de nouveaux billets de la monnaie nationale, l’ouguiya, à la valeur faciale divisée par dix, ainsi qu’un « endettement excessif » de près de 100 % du PIB ou des indices de développement classant la Mauritanie « au bas de l’échelle à tous les niveaux ».

Force anti-djihadiste

Sur le plan international, Nouakchott, qui a accueilli en juillet un sommet de l’Union africaine en présence du président français, Emmanuel Macron, a récemment réchauffé ses relations diplomatiques avec le Maroc, longtemps mises à mal par la question du Sahara occidental, et signé avec le Sénégal des accords sur la pêche et sur l’exploitation d’un important champ gazier transfrontalier. Enfin, c’est un général mauritanien qui a repris en juillet le commandement de la force anti-djihadiste du G5 Sahel, une organisation régionale regroupant, outre la Mauritanie, le Mali, le Burkina Faso, le Niger et le Tchad.

Le doute plane toujours sur les intentions de M. Ould Abdelaziz pour la présidentielle de 2019. Bien qu’il se soit engagé à maintes reprises à ne pas tenter de modifier la limitation à deux du nombre de mandats présidentiels, le chef de l’Etat n’est pas parvenu à apaiser les soupçons de l’opposition, alimentés par les déclarations publiques de ses ministres et de ses partisans.